13055. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A MAGDEBURG.
Pilzen, 16 juillet 1761.
J'ai reçu votre lettre du 12 de ce mois. Je suis bien aise que le ministère anglais a relevé l'invitation singulière que les puissances ennemies ont faite à l'Empereur pour l'admission au congrès. Rien de plus juste que ce que les ministres anglais viennent de déclarer à ce sujet.537-1 J'y adhère parfaitement et serais bien content, si ces ministres pouvaient exclure tout-à-fait l'Empereur de ce congrès et qu'ils sachent détourner au moins toujours à ce que la guerre que les Cercles m'ont faite, bon gré mal gré eux, ne soit jamais réputée en qualité de guerre légitime de l'Empire. Sur quoi, vous instruirez bien et solidement le baron Knyphausen,537-2 afin qu'il en sache faire un bon usage en Angleterre.
Plus j'y pense, moins je saurais m'imaginer que la France ait été si imbécile de faire une guerre aussi ruineuse pour elle, qui lui coûte à présent la perte de tant de possessions, et même contre ses intérêts les plus essentiels, en faveur de la nouvelle maison d'Autriche et d'insister, même jusqu'à ce moment présent, d'agrandir cette maison par la conquête de Silésie, sans que celle-ci ne soit convenue avec l'autré de cessions considérables à faire à la France, soit aux Pays-Bas, comme je présume, soit autre part. Sans cela, quel profit en retirerait la France de toute cette guerre, qui l'a mise presque à sa ruine, elle qui a reconnu tant de fois l'intérêt [qu'elle avait] elle-même à ce que la Silésie ne rentrait jamais sous la domination de la cour de Vienne. J'en ai touché quelque chose dans ma dépêche que voici au baron de Knyphausen.537-3 Je souhaiterais<538> qu'il fût possible que milord Granville pût s'éclaircir en confidence avec le sieur Bussy à ce sujet; je pense, d'ailleurs, que la France ne voudra rien toucher, pendant le cours de la négociation de Londres, de ses conventions avec la cour de Vienne pour la dédommager de son assistance; mais que, quand elle sera convenue une fois de sa paix séparée avec l'Angleterre, elle voudra seulement se développer au congrès d'Augsburg sur cet article comme d'une affaire alors étrangère à l'Angleterre, et y faire stipuler ou confirmer ces convenances que- la cour de Vienne lui avait stipulées. Je vous avoue que ce ne sont que des idées toutes vagues de ma part, mais pensez-y et ne manquez'd'en bien instruire le baron de Knyphausen; peut-être que je me trompe, peut-être que non : je ne connais au moins aucun autre motif raisonnable qui aurait embourbé, sans cela, la France dans cette guerre.
Je vous suis obligé des vœux que vous faites pour le succès de mes armes. Vous dites bien juste que la crise présente est plus forte qu'aucune des antérieures.
Der Minister wird von dem Vorrücken der Russen nach Schlesien unterrichtet.
Le général Zieten, auquel il a été impossible d'entreprendre quelque chose sur l'armée russe, dès que tous leurs corps furent assemblés, avait fait occuper avec quelques détachements de son corps un poste retranché au delà de l'Oder, près de Breslau, sur les hauteurs de Hundsfeld, et le gros de son corps a passé l'Oder de ce côté-ci, afin que nous soyons en état de nous joindre, au cas que la guerre se transporte en Haute-Silésie, et de couvrir toujours la capitale.
Je resterai tranquille ici jusqu'à ce que l'ennemi déclare ses desseins véritables; alors je m'y opposerai, autant que mes facultés me le permettront. Je ne hasarderai rien de gaieté de cœur, mais je risquerai tout, pour anéantir les projets de l'ennemi. Je crois, cependant, que les opérations de la campagne ne se commenceront pas avant le mois d'août, tout comme je vous l'avais prédit à Leipzig.538-1 Les forces de mes ennemis sont trop supérieures pour y résister; il faudra bien de l'adresse et que la Fortune me seconde dans les évènements.
Federic.
Nach der Ausfertigung.
537-1 Finckenstein hatte auf Grund eines ihm von Knyphausen und Michell, London 3. Juli, übersandten Berichtes geschrieben, die englischen Minister hätten bezüglich der Zulassung des Kaisers zum Congress erklärt, „que cette démarche paraissait contraire à la déclaration du 26 mars (vergl. S. 322), et que le roi d'Angleterre ne saurait s'y prêter, avant qu'on se soit concerté préalablement sur ce sujet avec ses alliés“ .
537-2 Finckenstein hatte in diesem Sinne schon vor Empfang der obigen Ordre am 18. Juli an Knyphausen geschrieben.
537-3 Nr. 13054.
538-1 Vergl. S. 522. Anm. 1.