<100>tâcher de disperser l'armée impériale. Voilà de quelle manière j'envisage le commencement de la campagne qui va s'ouvrir. Pour revenir à moi, je vous dirai que, si mes affaires tournent de la manière que je puisse agir, il faudra préalablement 1° que les Français agissent avec vigueur dans les Pays-Bas autrichiens, d'un côté ou d'autre, selon qu'ils le trouveront à propos ; 2° que leur armée dans le Brisgau prenne Fribourg et tienne alors bonne contenance jusqu'à ce que je commence mes opérations ; et 3° qu'incontinent après, quand mes opérations seront commencées, l'armée française avec celle de l'Empereur marche alors vers le Haut-Palatinat et la Bavière, pour s'en emparer convenablement, pendant le temps que je serais aux prises avec les Autrichiens.
Touchant la Bohême, je suis charmé de la confiance que Sa Majesté Impériale me témoigne, que, sans me vouloir lier les mains ni prétendre que mon armée soit privée du nécessaire, elle est persuadée que je traiterai ce pays alors comme un pays que je veux conquérir pour elle. Aussi n'y sera-t-elle pas démentie. Néanmoins, il y faut deux événements, savoir que notre affaire se pourra finir par une seule campagne, et alors l'Empereur aura la Bohême dans un bon état; mais s'il arrivait que la guerre ne se finît pas si tôt, et qu'on fût obligé de faire deux, trois ou quatre campagnes de suite, je vous laisse juger, en général expérimenté, si le pays ne s'en ressentirait point alors, et s'il serait possible d'en éviter la ruine. J'ai trouvé moi-même la différence qu'il y a d'un pays qui n'a eu qu'une campagne, d'avec celui qui a été obligé d'en supporter deux, lorsque je considère l'état de la Basse-Silésie contre celui de la Haute-Silésie, et plût à Dieu que nous ne voyions pas la triste expérience dans la Bavière, pays que je plains d'autant plus que je crains que, quand les Autrichiens se verront obligés de le quitter, ils ne tâchent encore de le ruiner de feu et de flammes.
Au reste, d'abord que le bon Dieu aura prospéré mes armes, de la manière que je serai maître de la capitale de la Bohême, il n'y aura nulle contestation que l'Empereur n'en soit mis en possession pour s'y pouvoir faire couronner; il dépendra même alors du bon plaisir de Sa Majesté Impériale si elle y voudra mettre en garnison son régiment des gardes, quoique je sois d'opinion que Sa Majesté Impériale se pourrait servir alors encore plus utilement dudit régiment auprès de son armée.
Je ne veux plus vous fatiguer par une lettre plus longue, pour vous parler encore du traité d'union confédérale, puisque vous saurez déjà que mes pleins-pouvoirs sont envoyés au sieur de Klinggærffen pour le signer et pour me l'envoyer alors à ma ratification. Aussi ne me restet-il que de vous assurer des sentiments d'estime avec lesquels je suis, Monsieur, votre très affectionné ami
Federic.
Nach dem Concept.