<348>le général Ghillanyi passa la Moldau, avec un corps de 10,000 hommes, tomba sur trois ou quatre détachements du régiment de Dieuri, qu'il défit, et empêcha toutes les livraisons du pays pour Tabor. Nous étions au . .1 de septembre2 et nous n'avions de farine à Tabor que pour huit jours, point de ressources pour en faire de nouvelles provisions, ni aucune espérance d'en pouvoir prendre sur l'ennemi, ce qui me fit prendre le parti de marcher à Tabor,3 pour être de là plus à portée de me rapprocher de mes magasins. J'appris à Tabor que les Saxons allaient joindre les Autrichiens, que le prince Charles faisait faire quatre ponts sur la Moldau, qu'il faisait amasser des provisions à Beneschau, et qu'il voulait me couper de Prague et de la Sazawa. Je savais que le poste de Beneschau est inattaquable, et que, si l'ennemi s'y mettait une fois, ne fût-ce qu'avec un détachement d'une vingtaine de mille hommes, il serait impraticable de l'en déloger; que ce mouvement me rejetait sur Rattay et sur Pardubitz, où j'avais un petit dépôt; que je n'avais que pour huit jours de farine, ce qui était opiné suffisant pour faire la marche de Beneschau; que j'aurais par conséquent manqué de pain avant que d'atteindre Pardubitz; que de plus, si les ennemis se mettaient entre moi et Prague, cette ville et la garnison, trop faible pour en soutenir la vaste enceinte, seraient à coup sûr perdues. Il y avait à considérer, d'un autre côté, que ce mouvement rétrogradif était fort préjudiciable à mes desseins, qu'il pouvait me faire perdre Tabor et Budweis et donner même à mes alliés des soupçons contre ma fidélité. Ce raisonnement était fort, mais la faim était plus forte encore, et l'article de Prague un argument sans réplique. B restait à savoir si l'on garderait les postes de Tabor et de Budweis. Si l'on considérait d'un côté que, nous en éloignant, il y avait à craindre que l'ennemi ne les prît, nous aurions dû les évacuer d'abord, mais à cela il y avait beaucoup à objecter. Je savais que le prince Charles était joint par les Saxons, je savais qu'il avait fait faire des ponts sur la Moldau ; ce qui semblait indiquer qu'il n'aurait pas quitté l'Alsace, qu'il n'aurait pas rassemblé tant de forces et qu'il ne ferait pas un mouvement aussi décisif que celui de passer la Moldau, s'il n'avait intention d'en venir à une bataille.
A ces préjugés se joignaient ceux de l'expérience. Dans la dernière guerre, l'ouverture des campagnes se faisait par une bataille, et ce qui achevait de me persuader que c'en serait de même de celle-ci, c'est la coutume qu'ont les Autrichiens, de tirer tout le parti qu'ils peuvent de leurs auxiliaires, le peu de risque qu'il y avait pour eux de faire tuer quelques Saxons, et l'espérance qu'ils pouvaient avoir qu'en me battant ils gardaient le champ libre et gagnaient la faculté de tourner toutes leurs forces, ou du moins la plus grande partie, contre la Bavière. Enfin, soit que l'on songe ce que l'on espère, ou que ces raisons furent solides, elles me parurent du moins telles, et, dans cette disposition, je
1 Lücke in der Vorlage.
2 Sic.
3 8. October.