1943. AU MINISTRE D'ÉTAT BARON DE MARDEFELD A SAINT-PÉTERSBOURG.
Camp de Chlum, 31 juillet 1745.
Les deux relations que vous m'avez faites le 10 de juillet, m'ont été bien rendues. Comme je vous ai déjà mandé la résolution que j'ai prise de ne plus souffrir si patiemment toutes les avanies intolérables que la cour de Dresde m'a faites et qu'elle continue à me faire, mais de l'attaquer dans son propre pays pour en avoir raison, ma volonté est que vous devez sans perte du temps représenter aux ministres de Russie que, comme il est assez connu, tant à l'Impératrice qu'à ses ministres, de combien de façons outrageantes la cour de Dresde m'avait traité jusqu'à présent, et tout ce qu'elle fait pour pousser ma patience à bout, nonobstant de tout ce que de mon côté j'avais fait et travaillé pour me rapprocher d'elle et pour vivre en paix avec elle, je m'étais vu à la fin indispensablement obligé de rompre ouvertement avec cette cour, qui jusqu'ici n'avait fait autre chose que d'avoir en but ma perte totale, et dont l'aigreur contre moi était allée si loin qu'elle avait voulu aujourd'hui partager mes États entre elle et la reine de Hongrie; qu'on n'ignorait pas combien de tentatives j'avais faites et combien- de propositions j'avais fait faire à cette cour pour vivre en repos avec elle, mais qu'elle les avait toutes refusées fièrement ou éludées, et témoigné par toutes ses démarches qu'elle ne voulait nullement<243> se départir de la résolution qu'elle avait prise contre moi selon le traité de Varsovie; que par toutes ces considérations je m'étais vu forcé de l'attaquer dans ses propres pays, quoique dans aucun autre dessein que de mettre par là mon pays en sûreté et inspirer à cette cour des pensées plus modérées sur mon sujet; que je déclarais qu'aussitôt que la cour de Dresde renoncerait aux liaisons dangereuses qu'elle avait prises contre moi, je serais à tout moment prêt de me réconcilier sincèrement avec elle d'une façon équitable, et de montrer par là que je ne souhaité en toutes les occasions plus que d'entretenir avec mes voisins une paix parfaite; que j'avais la confiance la plus parfaite en Sa Majesté Impériale de Russie qu'elle ne désapprouverait en aucune manière la démarche que je venais de faire, et que plutôt l'alliance et amitié étroite dans laquelle j'avais l'honneur d'être avec elle, me faisaient espérer qu'elle voudrait bien employer ses soins et ses bons offices pour que la bonne intelligence entre moi et le roi de Pologne, électeur de Saxe, soit rétablie d'une façon équitable, et que la paix soit remise entre des voisins si proches; que c'était tout ce que je désirais du roi de Pologne, et j'aurais des obligations infinies à Sa Majesté Impériale, si elle voudrait bien contribuer, de la manière que je la priais, à ce but salutaire, pour obvier aux suites funestes qui ne sauraient autrement que d'arriver.
Vous tâcherez de votre mieux pour que toutes ces insinuations parviennent à l'Impératrice même, en quoi vous emploierez vos amis et surtout le Vice-Chancelier; mais surtout vous serez bien en garde que le grànd-chancelier Bestushew n'en puisse pas faire un mauvais usage ou contraire à mes intérêts et intentions. J'attends votre rapport sur l'effet que cela aura fait, et de quelle manière l'Impératrice se sera expliquée là-dessus.
Federic.
Nach Abschrift der Cabinetskanzlei.