1988. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS A BERLIN.

Camp de Semonitz, 13 septembre 1745.

Mon cher Podewils. Je suis très mortifié de la nouvelle de Francfort que vous me marquez,279-1 et, selon ce que j'en puis juger par les mouvements du prince Charles, sa cour ne paraît point avoir accepté les propositions de paix. Que faire donc? Ce traité que nous venons de faire avec le roi d'Angleterre n'aura donc point de force; Harrington s'en servira pour fortifier les Hollandais dans le parti d'Angleterre, et nous en serons le sacrifice; on se moquera encore de nous, après nous avoir trompés. Peut-être a-t-on voulu nous amuser, pour empêcher que nous entamions la Saxe avant que le couronnement soit fait. B faut écrire sur tout ceci à Andrié, et mandez-moi ce que vous croyez, si le roi d'Angleterre pourra accomplir sa promesse ou s'il n'en a ni le pouvoir ni la volonté. Vous pouvez bien juger de ce qui se passe dans le fond de mon âme, et quelle terrible situation est la mienne. Si vous pensez que nos affaires sont rompues avec l'Angleterre, écrivez à Chambrier qu'il voie jusqu'où pourra aller le secours que nous désirons des Français, et qu'il en tire pied ou aile. En attendant, je me verrai obligé de faire un mouvement pour me rapprocher de ma frontière, faute de subsistance. J'ai tant d'espèces de chagrins, d'embarras et d'inquiétudes sur les bras que je ne sais comment je n'y succombe point; les prétendus desseins des Autrichiens sur ma personne sont de bonnes chimères et le point qui vous doit le moins embarrasser; en un mot, je ferai mon devoir, et du reste, si ma perte est résolue par le destin, il faut que j'y souscrive et [que je prenne]279-2 d'avance mon parti sur tous les malheurs qui peuvent m'arriver et que je ne saurais empêcher. Aussi bien le bonheur et le malheur ont leur terme, il faut savoir les supporter l'un et l'autre avec autant d'égalité d'âme que la condition humaine le permet. Sur quoi, je prie Dieu etc.

Federic.

P. S.

Aussi vous adressé-je ci-clos un ordre sous cachet volant au prince d'Anhalt, duquel vous ne ferez usage et ne le lui enverrez que dès que vous saurez que nos affaires sont rompues en Angleterre, soit qu'on n'ait voulu que nous amuser, soit que le roi d'Angleterre ne puisse accomplir sa promesse.279-3 Vous n'oublierez pas alors, aussi, de bien instruire Chambrier sur l'article des subsides et sur le secours que nous pourrions avoir nécessaire des Français, et de lui envoyer d'amples instructions sur ces sujets-là, au plus tôt possible.

Federic.

Nach der Ausfertigung.

<280>

279-1 Pollmann hatte am 3. September berichtet, dass die Majorität im Churkollegium, trotz aller Proteste von Brandenburg und Pfalz gegen die vorgefallenen Unregelmässigkeiten, die Kaiserwahl auf den 13. September anberaumt habe.

279-2 Lücke in der Vorlage in Folge mangelhafter Dechiffrirung.

279-3 Der Befehl kam nicht zur Verwendung.