<496> êtes à présent. Notre cardinal de Breslau est mort,1 je viens d'accoucher d'un nouvel évêque, le Pape en est parrain, je ne sais s'il s'acquittera de son parrainage de bonne grâce.2 Le schah Thamas a eu la tête tranchée, après en avoir bien fait sauter de sa vie. Son règne était fondé sur des cruautés énormes; c'était un fameux bourreau qui n'a pu s'assouvir de sang, et qui préférait l'ambition à toute chose.
Pour moi, je suis heureusement désabusé de cette passion; j'ai cuvé le filtre qu'elle m'avait donné, et je ne songe qu'à couler d'une façon tranquille les jours que le Ciel me départ, de profiter du plaisir sans en abuser, de faire tout le bien que je peux, et d'abandonner l'erreur, l'astuce et la vanité à ceux qui en veulent être les dupes.
Je vous demande pardon, ma chère sœur, de ce que je mêle tant de morale dans mes lettres; c'est vous qui me séduisez. Vous avez toute sorte d'esprits, toute sorte de talents et toute sorte de connaissances; on peut vous parler coiffure, guerre, politique, et vous entretenir de la plus sublime philosophie jusqu'aux romans les plus frivoles, sans qu'aucune de ces matières ne vous soit étrangère. Je devrais vous parler davantage de mon amitié, mais elle vous est connue, et je ne veux pas vous ennuyer de ce qui fait le bonheur de ma vie; je vous prie d'être persuadée que ce sont ces sentiments que vous m'avez fait connaître tant de fois, et auxquels je tâche de répondre avec toute la sincérité possible, étant avec tendresse et estime, ma très chère sœur, votre très fidèle frère et serviteur
Federic.
Nach der Ausfertigung im Königl. Hausarchiv zu Berlin. Eigenhändig.
2790. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A LEIPZIG.
Potsdam, 7 octobre 1747.
J'ai vu avec satisfaction, par la dépêche que vous m'avez faite du 3 de ce mois, que vous avez trouvé moyen de mettre sur la bonne voie le sieur Williams, touchant l'affaire de Magdebourg. A cette occasion, je veux bien vous dire qu'il me serait agréable si, dans quelque conversation confidente que vous aurez seul avec ce ministre sur les affaires publiques, vous pouviez lui insinuer adroitement et par manière de conversation que tout le monde était surpris de ce que sa cour n'avait point nommé encore un nouveau ministre à ma cour; qu'autant que vous étiez au fait des affaires, vous étiez persuadé qu'un ministre anglais à ma cour ne porterait point de préjudice aux affaires des Puissances maritimes; que, selon vous, ce pourrait être le moment où un tel ministre trouverait peut-être plus de bonnes dispositions à Berlin qu'à Dresde. Vous userez cependant de votre prudence ordinaire en
1 Graf Sinzendorff; gestorben 28. September 1747.
2 Vergl. S. 18. 502.