2190. AU MINISTRE D'ÉTAT BARON DE MARDEFELD A SAINT-PÉTERSBOURG.
Potsdam, 12 avril 1746.
J'ai reçu la dépêche que vous m'avez faite le 26 du mois dernier de mars. Je me remets à ce que j'ai ordonné à mes ministres à vous mander. Plus j'envisage tout ce qui se passe en Russie, plus je me confirme dans le sentiment que j'ai eu jusqu'ici, que, nonobstant le noir et malin vouloir du chancelier de Russie, ni la Russie ni les Autrichiens et Saxons ne me pourront entamer, manque d'argent; et quoique la Russie fasse des démonstrations qui devraient m'ombrager et qui doivent vous tenir extrêmement alerte sur ce qu'on intrigue là où vous êtes, et sur ce qu'on a envie de faire contre moi, pour m'en informer bien exactement, je me fie néanmoins encore sur le ministère britannique d'à présent et sur la nation anglaise, qui paraissent être fort portés pour moi; ainsi que je me flatte que tous ces grands préparatifs de la Russie s'en iront en fumée. Une sage prévoyance demande pourtant que vous ne discontinuiez pas à observer de bien près toutes les allures du ministre et de mes soi-disants amis nouvellement réconciliés, c'est-à-dire les Autrichiens et les Saxons, et de m'en informer le plus exactement qu'il sera humainement possible, les conjonctures étant trop critiques pour que vous ne deviez vous appliquer extrêmement à approfondir toutes les intrigues et menées de mes ennemis, pour m'en informer à temps.
Je trouve vos raisons, par rapport au colonel de Grape, trop justes1 pour que je dusse plus penser à l'y envoyer; je souhaiterais pourtant de savoir de vous quel personnage je dois envoyer pour présenter à l'Impératrice le carrosse que je lui ai destiné, et si c'est plutôt par vous que je le dois faire présenter; sur quoi j'attends votre avis au plus tôt possible.
J'approuve fort la réponse que vous avez faite aux officiers hussards russiens qui vous ont témoigné d'envie d'entrer en mon service. Il y en a qui sont de cœur et de tête et qui ont la renommée d'une bravoure distinguée; je les accepterai, mais quant au reste, je ne m'en soucie guère, étant pourvu d'officiers de hussards dont j'ai raison à me louer.
Federic.
Nach dem Concept.
1 Mardefeld's Gründe sind enthalten in einem Schreiben an Podewils vom 26. März: „Grape est en aversion auprès de l'Impératrice et haï des ministres; d'ailleurs, malgré son esprit et sa souplesse, il n'a pas ce qu'il faut pour plaire ici ni pour y faire des progrès, et assurément il ne produirait aucun bien par la connaissance qu'il a contractée à Kiel avec quelques Holsteinoi“ etc. Ueber frühere Sendungen Grape's nach Russland vergl. Bd. II, 315. 412.