<102> m'étais engagé par la paix de Dresde ne me permettait nullement de me mêler de la guerre presente. Qu'en conséquence donc, si je voulais à présent contrarier la France au congrès de paix et la forcer à se prêter à des conditions déshonorables pour elle, le chevalier Legge devait convenir lui-même que la France aurait raison de me décrier comme un prince double et faux sur lequel il n'y avait nul fond à faire; mais qu'il pouvait compter que, dès que la paix générale serait faite, la cour de Vienne commencerait à chipoter avec celle de Versailles, et qu'alors l'Angleterre pourrait compter sur moi comme sur son allié le plus fidèle, dès que nous serions convenus sur notre alliance réciproque.

Voici tout ce qui s'est passé dans l'entretien que j'ai eu hier avec le chevalier Legge. Comme je lui parlerai encore aujourd'hui, je vous manderai le reste, vous chargeant, en attendant, du secret le plus absolu sur tout ce que je viens de vous communiquer. Et sur ce, je prie Dieu etc.

Federic.

P. S.

Ayant été averti de différents endroits combien de mauvaises intentions le comte Gronsfeld a témoignées jusqu'ici contre moi dans les conversations particulières qu'il a tenues sur mon sujet, et que sa mauvaise volonté à mon égard va si loin que depuis l'arrivée du comte de Keyserlingk à Berlin et après tout ce temps-là il s'est mêlé de faire tout ce qui lui a été possible pour indisposer les ministres étrangers à ma cour contre moi et les remplir de défiances à mon égard, j'ai trouvé nécessaire que vous fassiez venir le comte de Gronsfeld chez vous et que vous lui disiez en particulier combien j'étais instruit de son mauvais procédé, et que j'avais d'autant plus lieu d'être surpris de sa conduite étrange que non seulement sa personne m'appartenait par le titre de sujet né et de vassal, mais qu'il était envoyé d'une puissance avec laquelle j'avais la satisfaction de vivre en bonne amitié et intelligence. Que je voudrais cependant oublier le passé, pourvu qu'il changeât de conduite et qu'il ne fît plus des démarches aussi préjudiciables à moi que contraires aux vues de son Prince et de ses maîtres. Mais que, si malgré cela il continuait à briguer contre moi, je ne saurais plus m'empêcher de demander son rappel, comme d'un ministre mal intentionné et point propre à entretenir la bonne harmonie et intelligence entre moi et sa République. Que ce serait en vain s'il voulait éluder les plaintes que j'avais contre lui, par des protestations du contraire et en niant le fait, que je savais à quoi me tenir là-dessus, et qu'il n'avait qu'à prendre son parti ou en faisant mieux à mon égard ou de s'attendre que je demandasse son rappel au Prince son souverain et à ses maîtres.

Federic.

Nach der Ausfertigung.