<137> je me vois nécessité de vous dire que je ne saurais à cette heure me reposer entièrement sur vos rapports.
Il est constant que le comte de Kaunitz a eu ordre d'accéder aux préliminaires et de les signer en conséquence, mais j'ai toutes les peines du monde à m'imaginer la réalité de ce que vous me mandez d'un subside de seize millions de florins que la reine de Hongrie doit avoir demandé aux États de ses pays héréditaires. Je suis fondé à croire que le montant des revenus ordinaires annuels de la reine de Hongrie ne va qu'à grande peine à cette somme: serait-il bien possible, après cela, que ses États pussent lui fournir un extraordinaire aussi immense? Il se pourrait toutefois que la reine de Hongrie formât des prétentions aussi énormes dans la vue de se débarrasser des grandes avances que ses États lui ont faites jusqu'ici, et qu'elle demandât le susdit extraordinaire de seize millions de florins pour en faire rémission à ses États, dès que ceux-ci auraient consenti à une compensation qui s'en ferait de leurs avances.
Que la mauvaise volonté de la cour de Vienne soit montée au plus haut degré possible — cette cour ne se trouvera pourtant pas, au bout du compte, en état, après avoir fini sa présente guerre, de lier partie contre moi sans être soutenue des deux Puissances maritimes. Et quand bien même la cour de Vienne voudrait se servir des Russes contre moi, ceux-ci le refuseraient sûrement et ne voudraient pas se mettre pour l'amour d'elle en embarras; pour ne pas dire que, si la cour de Vienne tramait quelque entreprise contre moi, elle se donnerait bien de la garde de congédier quinze de ses régiments, comme pourtant elle est sur le point de le faire, selon les avis qui m'en sont venus. Il résulte de là qu'il n'y a aucune apparence qui puisse m'ombrager et me faire appréhender une nouvelle guerre.
Federic.
Nach dem Concept.
3106. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A SAINT-PÉTERSBOURG.
Potsdam, 11 juin 1748.
J'ai reçu votre dépêche du 25 de mai dernier, et j'ai tout lieu d'être satisfait de vos rapports par la connaissance et intelligence entière que vous avez des affaires de la cour où vous êtes; aussi suis-je bien de votre sentiment que je n'ai réellement rien à appréhender de la Russie. J'approuve néanmoins que vous continuiez avec soin d'avoir l'œil aux intelligences qui subsistent entre le comte de Bestushew et la cour de Vienne. Au reste, je suis assez porté à croire que les guinées anglaises accommoderaient mieux et seraient plus du goût du premier ministre russien que le peu que lui donne la reine de Hongrie, et je suis par là même dans la persuasion qu'après tout la cour de Vienne pourrait bien ne pas faire grande chose avec les Russes. En attendant,