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3145. AU CHAMBELLAN D'AMMON A AIX-LA-CHAPELLE.

Potsdam, 5 juillet 1748.

J'ai reçu vos deux dépêches du 25 et du 28 du mois de juin dernier, et je vous dirai, pour ce qui est des imputations que le comte de Saint-Séverin vient de vous énoncer, qu'il m'est tout-à-fait incompréhensible d'où peuvent avoir pris leur origine les faux bruits que j'étais dans l'idée que lui, le comte de Saint-Séverin, n'avait agi que faiblement pendant les négociations des préliminaires de paix pour me procurer la garantie de la Silésie et du comté de Glatz, et qu'ainsi j'en avais fort peu d'obligation à lui et à la France.

Vous assurerez fort et ferme le comte de Saint-Severin que chose semblable ne m'était jamais venu en pensée; que je reconnaissais parfaitement tout le prix de l'amitié de la France, et que lui, comte de Saint-Séverin, pouvait être assuré de toute mon estime, et que je n'oublierai jamais tous les bons services qu'il m'avait rendus, depuis son envoi en Pologne.1

Que je ne savais pas de quelle façon Chambrier s'expliquait sur la garantie en question et sur les préliminaires en général, mais qu'il pouvait être persuadé que j'avais pris toute la part imaginable à la paix que la France venait de faire, et que vous étiez en état de lui montrer les dépêches que vous aviez reçues de moi depuis les préliminaires faits, par où il serait convaincu combien j'avais goûté que la France eût fait cette paix et combien j'en avais été content. Qu'au reste, je ne pouvais attribuer tous ces faux bruits qui étaient parvenus jusqu'à lui, comte de Saint-Séverin, qu'à de noires calomnies de mes ennemis et envieux, qui avaient leur dessein là-dessus.

J'approuve d'ailleurs, quant au contenu de votre post-scriptum du 28 du juin dernier, que vous soyez attentif et que vous veilliez au possible à mes intérêts; mon intention est cependant que vous ne vous donniez pas tant de mouvement pour ma garantie que d'en fatiguer les ministres du congrès, qui actuellement ont la tête remplie de toute autre chose, et que vous évitiez avec soin de ne les point indisposer contre nous, en les fatiguant mal-à-propos et à contre-temps ; mais plutôt que vous continuiez seulement à observer ce qui se passera là où vous êtes, jusqu'au moment où il s'agira de projeter le traité définitif de paix. Je saurai, en attendant, prendre mes précautions tant à la cour de Londres qu'à celle de France.

Au reste, comme selon les apparences il est survenu quelque méfiance entre les ministres de la France et de l'Angleterre, je vous recommande un article essentiel et des plus importants, qui est que vous soyez fort sur vos gardes, afin de ne vous en mêler ni en blanc ni en noir, et même que vous ne répondiez le mot à ce qui vous en pourrait être dit. En cas que ces méfiances dussent aller plus loin encore à cause



1 Vergl. Bd. III, 327.