<565> y voir leur parents ou pour y travailler, mais qu'on [les] fait revenir dès que les régiments se rassemblent; ce que j'avais présentement permis de faire à mes régiments, pour faire comprendre à mes jaloux que je n'ai nul dessein de remuer; mais qu'au reste je me garderai bien de faire la moindre réforme dans mes troupes.
Au surplus, comme la cour de Vienne a pris à tâche de disséminer tous les bruits calomnieux qu'elle sait imaginer sur mon sujet, je viens d'apprendre qu'il en court un nouveau assez singulier à Vienne, savoir que j'entretenais plus de deux cents personnes tant en Hongrie qu'en Transylvanie pour y exciter les peuples à la révolte; que ces gens avaient ordre d'aller de ville en ville et de village en village, pour exciter aux habitants l'esprit de sédition, mais que ces émissaires avaient mal exécuté leurs instructions et s'étaient trahis en payant trop largement dans les auberges, que les commandants en Hongrie en avaient donné avis à la cour de Vienne, qui n'y avait point fait attention, que cependant on avait à la fin arrêté quelques-uns.
Quoique de pareils bruits sots et impertinents ne méritent qu'un mépris souverain, cependant, comme ils pourraient aller jusqu'à la cour de France, j'ai cru nécessaire de vous communiquer là-dessus les réflexions suivantes : que comme après le rétablissement de la paix en Europe la reine de Hongrie a mis la plupart de ses troupes en Hongrie, et que je suis en paix avec cette Princesse, ce serait la chose la plus incongrue si j'avais seulement la pensée de vouloir susciter des [révoltes] en Hongrie à l'Impératrice-Reine; mais le cas posé que je fusse en guerre avec elle, une pareille entreprise, quand même je voudrais alors m'y prêter, n'aboutirait toujours à rien. A la vérité la Hongrie est pleine de mécontents, mais la politique dont les Empereurs défunts se sont send à cet égard, a été ou de s'attacher les principaux de la nation hongroise ou de les obliger à se faire de grands et magnifiques établissements aux environs de Presbourg et de là vers les confins de l'Autriche, afin d'avoir ceux-ci toujours sous les yeux; d'où il s'en suit qu'une rebellion en Hongrie sera toujours sans un chef de quelque considération qui saurait lier la partie, et, par conséquence, suscitée gratuitement. Il faut ajouter encore que de pareilles entreprises demanderaient de grandes sommes en argent que je ne serais point en état d'y employer pendant que j'aurais à soutenir les autres frais indispensables d'une guerre. Voilà les arguments dont vous pourrez vous servir pour convaincre le marquis de Puyzieulx de la futilité de ces bruits-là, et que je n'y ai pensé ni en temps de paix ni de guerre.1 Vous ajouterez qu'il était vrai que j'avais plusieurs gentilshommes hongrois qui servaient d'officiers dans mes régiments de hussards, et qu'il y en a eu qui par leurs blessures ou par vieillesse ont demandé et obtenu leur congé et qui alors sont retournés dans leur patrie, mais que c'étaient tous des gens sans bien que
1 Vergl. Bd. IV, 124.