3219. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A HANOVRE.
Potsdam, 24. août 1748.
Vous me mandez dans votre relation du 18 de ce mois que vous ne remarquez pas que le ministre de Russie soit plus lié ni plus distingué que d'ordinaire; à cela je vous dirai que, comme c'est proprement à Pétersbourg où les grandes affaires entre l'Angleterre et la Russie se traitent, il se peut fort bien qu'on ne traite le susdit ministre que d'ordinaire afin de cacher d'autant mieux ce que se négocie à Pétersbourg, d'où mes dernières lettres m'apprennent que le lord Hyndford a dû dépêcher, le 7 de ce mois, un courrier à sa cour, envoi qui, se faisant peu de jours après le retour du chancelier Bestushew de Péterhof, où il a vu l'Impératrice, et après plusieurs conférences qu'il a eues avec le Chancelier et avec le ministre autrichien — donne un nouveau degré de probabilité qu'il y ait une nouvelle négociation sur le tapis entre les Puissances maritimes et les deux cours impériales, pour contrebalancer l'influence de la France dans les affaires de l'Europe. On présume que c'est la cour de Vienne qui, parcequ'elle gagnera le plus à une pareille alliance, en a fait naître l'idée aux Puissances maritimes; que le chancelier de Russie y a donné tête baissée, pour flatter la vanité de sa Souveraine, et que la passion du roi d'Angleterre pour les intérêts de l'Autriche y a trouvé sa convenance et que celui-ci voudrait bien me faire entrer par voie d'accession dans cette ligue ou quadruple alliance défensive contre la France. Tout ceci ne sont cependant que des conjectures, dont vous pourrez peut-être déterrer là où vous êtes si elles sont fondées ou non.
Par les lettres que j'ai eues d'Aix-la-Chapelle, on m'a voulu assurer que l'article de la garantie de la Silésie serait couché dans le traité définitif tel qu'il est dans les préliminaires, mais que l'on exigerait en échange que j'accède au traité par un acte formel et que par conséquent je garantisse réciproquement toutes les dispositions qui y sont faites. Si cet avis se vérifie, je n'hésiterai pas de donner cet acte d'accession, vu que la France a condescendu elle-même à stipuler cette condition; ainsi, si l'on venait à vous sonder sur ce sujet, vous pouvez bien dire alors que je me conformerais volontièrement à ce que l'on aurait stipulé dans le traité définitif de paix. Cependant cette démarche du ministère français, avec d'autres qu'ils feront encore, vous doit faire connaître la faiblesse de ce ministère.
Federic.
Nach dem Concept.
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