3321. AU CONSEILLER BARON LE CHAMBRIER A PARIS.
Potsdam, 2 novembre 1748.
J'ai reçu vos deux dépêches du 18 et du 20 d'octobre dernier. B est raisonnablement à croire qu'au bout du compte la France aussi bien que l'Angleterre seront bien aises de se tenir d'abord tranquilles, pour tâcher de se remettre ainsi de l'affaiblissement dans lequel elles se trouvent. L'Angleterre néanmoins, à ce qu'il me revient de différents endroits, doit réellement être plus épuisée que ne l'est la France, de sorte qu'il lui faudra peut-être dix ou douze années de temps avant qu'elle puisse penser à de nouvelles entreprises. C'est aussi par cette considération, dit-on, qu'elle doit être intentionnée de ne point pousser davantage, après que ses quatre années de permission se trouveront être finies,277-1 l'affaire concernant son traité d'Assiento avec l'Espagne. La reine de Hongrie et le roi de Sardaigne sont toutefois les deux puissances qui restent les moins édifiées du traité définitif de paix, signé en dernier lieu à Aix-la-Chapelle.
Les circonstances dans lesquelles se trouvent présentement les affaires de la Suède, ont été un peu outrées, là où vous êtes, par le ministre de Suède.277-2 Il n'est ni probable ni à croire que la Russie ou le Danemark voulussent après la mort du roi de Suède former des entreprises contre la succession une fois établie en Suède en faveur du Prince-Successeur; mais bien il ne serait point douteux que, si après la mort du Roi on pouvait être intentionné en Suède de ne point vouloir s'y tenir simplement à l'acte du couronnement du Prince-Successeur, mais qu'on voulût dans un même instant y changer ou innover la présente forme du gouvernement, il ne serait point douteux en ce cas, dis-je, qu'il en ré<278>sulterait des divisions entre les États de ce royaume, dont le parti opposé réclamerait l'assistance de la Russie, qui pour lors se prévaudrait à coup sûr de pareille occurrence pour en prendre occasion d'agir, conjointement avec le Danemark, contre la Suède. Les Suédois sauront cependant y mettre obstacle et empêcher même que cela n'arrive, pourvu qu'ils se conduisent sagement après la mort de leur Roi et ne touchent absolument point à la forme présente de leur gouvernement, mais qu'ils y laissent tout sur l'ancien pied, au moins jusqu'à ce que les conjonctures leur soient plus favorables qu'elles ne le sont à l'heure présente.
Federic.
Nach dem Concept.
277-1 Vergl. S. 240.
277-2 Scheffer.