<305> cour où vous êtes ne serait point fâchée de voir le feu de guerre allumé dans le Nord, pourvu qu'elle n'y soit pas d'abord mêlée et qu'elle sache rester derrière les rideaux; ce qui cependant ne saura se faire absolument, par la raison que la Russie n'agira pas sans être assurée du secours de la cour de Vienne, et particulièrement puisqu'il lui faut un corps de la cavalerie autrichienne, sans lequel elle ne saura jamais agir contre moi. Au surplus, mes ministres du département des affaires étrangères vous instruiront en détail sur les démarches que la cour britannique redouble pour fortifier son parti par des alliances avec des Princes de l'Empire. L'affaire est faite avec l'électeur de Cologne;1 l'on parle de renouveler avec celui de Mayence; on chipote avec la Saxe, par laquelle l'on croit qu'on s'assurera de la Bavière.
Autant que je saurais juger jusqu'à présent de tout ce manége, je crois que le but principal en est de s'assurer du plus de suffrages qu'on pourra, pour être sûr de son fait dans l'élection d'un roi des Romains, qu'on médite de faire dans la personne de l'Archiduc aîné. J'estime, aussi, que les mesures sont si bien prises qu'on ne saura point mettre d'obstacle à cette affaire, dès qu'elle sera entreprise. En attendant, vous devez être bien vigilant pour approfondir si peut-être je me trompe dans mes conjectures et s'il y a quelque autre dessous de cartes à qui tous ces mouvements extraordinaires visent.
Pour ce qui est de mes lettres de Russie, elles ne me font entrevoir jusqu'ici que de nouvelles déclarations que le chancelier Bestushew médite, de faire à la Suède, de même que des agaceries sans fin et des démonstrations guerrières, sans qu'on veuille pourtant pousser les affaires à une rupture ouverte. Reste à savoir si cela continuera.
Au surplus, mon attente particulière est d'apprendre de vous ce qui se passe dans la Turquie et jusqu'où la Porte Ottomane pourra influer dans les affaires d'Europe au cas de guerre dans le Nord; ainsi que vous devez tâcher de votre mieux de pouvoir m'en instruire.
Federic.
Nach dem Concept.
4200. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION FRÉDÉRIC DE VOSS A COPENHAGUE.
Potsdam, 24 mars 1750.
J'ai été satisfait autant qu'on le peut du contenu de votre rapport du 17 de ce mois, et je ne doute pas moi-même qu'en cas que la cour de Danemark fasse faire des déclarations énergiques de sa part aux cours de Vienne, de Londres et principalement à celle de Pétersbourg, concernant les prétentions injustes dont cette dernière moleste la Suède — qu'en ce cas, dis-je, lesdites déclarations du Danemark ne fassent impression sur ces cours et ne produisent un bon effet.
1 Vergl. S. 295. 303.