Quoique je sois persuadé que tout ce que le comte Lynar a représenté au chancelier Bestushew pour rapatrier la Russie avec la Suède, ne fera guère impression sur lui, et qu'il ne voudra jamais accepter les bons offices que la cour de Danemark a offerts à ce sujet, il est toujours bon que ledit comte Lynar a pris cette voie-là, afin de pouvoir tirer au moins de la réponse que le Chancelier y fera, des conjectures sur les vues qu'il saurait avoir relativement à la Suède; mais telles quelles sauraient être ces vues, je présume qu'au bout du compte il se verra obligé d'acquiescer, bon gré malgré lui, au projet de pacification que la France fera faire par l'Angleterre à la Russie pour terminer ses différends avec la Suède;1 et si je [puis] d'ailleurs compter sur ce qui me revient de différents lieux, je crois que la Russie est effectivement dans l'appréhension que la Suède ne change la forme de son gouvernement, et qu'elle mettra de l'eau dans son vin, quand elle se verra rassurée sur cette crainte. Au surplus, je regarde comme une fanfaronnade tout ce que le Chancelier a voulu dire au comte Lynar de la déclaration que le Grand-Visir doit avoir faite au sieur Neplujew,2 et, quant aux ordres que le général Lieven et d'autres officiers ont reçus de retourner à leurs postes, je crois qu'on ne laissera pas d'assembler quelque corps de troupes par les frontières de la Livonie et de faire les mêmes ostentations qu'on a faites dans les dernières années passées.
Federic.
Nach dem Concept.
4343. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS, ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE, A VIENNE.
Königsberg, 8 juin 1750.
La dépêche que vous m'avez faite du 27 du mois passé, m'a été rendue. Ce que vous me marquez par rapport aux propos qu'un courrier du comte Bernes doit avoir tenus à son retour à Vienne, se confirme par les dernières lettres que j'ai de Pétersbourg, qui me marquent que le chancelier Bestushew a dernièrement dit tout hautement qu'il avait été surpris d'apprendre que les cours de Londres et de Vienne prétendaient que c'était avec son approbation qu'elles avaient [donné] l'année passée à la France des assurances positives relativement aux dispositions pacifiques de la Russie;3 qu'il n'en était absolument rien, et que tout ce qui s'était passé dans ce temps-là entre lui et les ministres des cours mentionnées, c'était que, sur la demande qu'ils lui avaient faite si l'intention de la cour de Russie était d'attaquer la Suède, il leur avait simplement répondu par manière de discours que cela ne se ferait pas, aussi longtemps que les Suédois ne voudraient pas changer la forme de leur gouvernement, sans songer seulement à la France. L'on ajoute que le comte Bernes n'avait pas fait difficulté d'avouer que le Chancelier ne
1 Vergl. S. 377.
2 Vergl. S. 392.
3 Vergl. S. 134. 160.