4361. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION DE ROHD A STOCKHOLM.

Potsdam, 23 juin 1750.

Au retour de mon voyage en Prusse, j'ai trouvé devant moi les dépêches que vous m'avez faites des 2, 5, 9 et 12 de ce mois, et je vous sais bon gré du détail instructif que vous m'avez fait relativement au négoce de fer de la Suède.

Pour ce qui regarde les différends entre la Suède et la Russie, je suis bien éloigné de les croire autant apaisés qu'ils paraissent être aux ministres suédois; bien au contraire, en combinant toutes les nouvelles qui me sont parvenues de différents lieux à ce sujet, il paraît assez clairement que la Russie et ses alliés sont intentionnés de laisser dormir pour un temps ces affaires et de faire, pour ainsi dire, une trêve jusqu'à ce qu'ils auront mieux arrangé leurs flûtes que dans le temps passé, pris leurs arrangements, et trouvé à la fin le moment favorable où ils se croiront être à même de mettre en exécution leurs vues. La Russie, en particulier, voudra attendre l'assemblée prochaine de la Diète en Suède, où elle tâchera de faire directement et indirectement tout le mal imaginable au ministère suédois et de faire alors<405> jouer tous les ressorts possibles pour le renverser et pour y exciter des troubles dans l'intérieur du royaume.

A cette occasion, je dois vous dire qu'il m'est revenu de différents lieux comme si la nation suédoise n'était plus si zélée ni si prévenue pour le gouvernement présent, comme elle avait été autrefois; qu'au contraire le mécontentement dans ce royaume allait toujours en augmentant, mécontentement qu'on attribuait tant à la distribution des emplois militaires, à l'égard desquels on donnait souvent la préférence aux jeunes officiers sur ceux qui s'étaient rendu mérités par de longs services, qu'à la vénalité des charges dans le civil. J'ai cru devoir vous communiquer tous ces avis-ci, afin que vous sachiez m'instruire si les choses sont effectivement telles qu'on les a marquées, ou s'ils ne sont que de faux bruits, semés par les ennemis de la Suède et de son gouvernement. Je veux même vous permettre que vous fassiez adroitement des insinuations convenables à ceux du gouvernement dont vous saurez être sûr du secret, afin que ceux-ci tâchent de démêler ces gens qui voudront imposer à la nation par de pareils bruits, et de prendre préalablement leurs arrangements là-dessus. Au surplus, je veux bien vous confier, quoiqu'à vous seul, que ce qui me donne des soupçons sur la façon d'agir des ministres de Suède, c'est qu'ils n'ont point voulu permettre au chevalier de La Touche de passer en Finlande, chose qui tôt ou tard ne laissera pas de faire un mauvais effet auprès de la France. D'ailleurs il ne plaît point à moi que je ne voie aucune fermeté dans leur conduite, ayant remarqué dans plus d'une occasion qu'ils désespèrent tantôt sans raison de leurs affaires, et que tantôt ils s'en flattent trop.

Federic.

Nach dem Concept.