Quant au projet pour l'extension de la Compagnie Asiatique d'Emden et pour la création d'une marine, je ne saurais qu'envisager ce que vous me marquez à ce sujet que comme une marque du zèle et de l'attention que vous avez pour tout ce qui regarde mon service; mais indépendamment de cela il faut que je vous dise que ce projet me mènerait trop loin et me ferait entreprendre des choses auxquelles mes forces ne suffiraient pas et qui me pourraient jeter dans de grands embarras. C'est la France qui peut entreprendre d'aussi grands desseins, mais il ne me convient pas d'embrasser beaucoup de choses importantes à la fois. Rien n'est plus vrai que ce qu'on dit communément que tout homme qui trop embrasse mal étreint, ce que j'éviterai soigneusement de faire. Vous n'avez donc qu'à remercier poliment l'auteur du projet en question de la bonne volonté qu'il avait bien voulu me marquer. Au surplus, quoique je convienne parfaitement de l'habileté de cet auteur et de ses grandes connaissances en fait de commerce, vous devez savoir nonobstant de cela que ce personnage n'est pas d'un trop bon caractère du côté du cœur, et qu'ainsi il faut bien qu'il ne soit pas aussi innocent qu'on le fait passer à présent dans le monde, ce dont je sais plusieurs particularités. Vous me ferez plaisir de ne pas vous mêler davantage avec lui, ni de vous y fier tout-à-fait. Federic. |
Nach dem Concept.
5022. AU COMTE DE TYRCONNELL, MINISTRE DE FRANCE, A BERLIN.
Potsdam, 22 juillet 1751.
Milord. Mon ministre à Vienne vient de m'avertir qu'il avait vu une lettre de Berlin par laquelle l'on marquait à la cour de Vienne comme s'il y avait eu, à l'occasion des prétendues nouvelles oppressions des Protestants en France, un de leurs émissaires à Berlin, qui en était reparti depuis peu, très satisfait de la protection et des privilèges que je voudrais accorder à ceux qui voudraient quitter leur patrie pour venir s'établir dans mes États. Quoique je sois persuadé de votre pénétration que, si même la clique autrichienne à Berlin voulait vous faire des insinuations là-dessus, elles ne feraient jamais impression sur vous, et que vous, étant sur les lieux, en reconnaîtriez d'abord la fausseté, j'ai néanmoins bien voulu vous en prévenir, en vous protestant qu'il n'a du tout été question d'un pareil émissaire, et que tout ce qu'on débiterait là-dessus, ne seraient que des mensonges tout purs, malicieusement controuvés. Au surplus, comme mon susdit ministre me demande le secret de son avis, pour ne pas exposer la personne qui lui a fait voir la lettre ci-dessus mentionnée, je suis persuadé, Milord, que vous voudrez bien me le ménager de votre part. Sur ce, je prie Dieu etc.
Federic.
Nach der Ausfertigung im Archiv des Auswärtigen Ministeriums zu Paris.