4460. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION DE ROHD A STOCKHOLM.
Potsdam, 11 août 1750.
J'ai reçu votre dépêche du 31 passé, et c'est avec bien de la surprise que j'ai vu le soudain changement qu'il y a eu dans la résolution qu'on avait prise de renforcer les troupes en Finlande. Je ne veux entrer en discussion sur le faible des raisons qu'on vous a alléguées pour colorer ce changement, je vous dirai seulement que vous devez remontrer aux ministres de Suède que, pour ma personne et à l'égard de mes États, il me saurait être indifférent si les Suédois prennent de bonnes mesures pour la défense de la Finlande ou s'ils n'en prennent pas, mais qu'en bon ami et allié de la Suède je ne saurais leur donner un meilleur conseil que de se mettre en Finlande en un bon état de défense; que j'avais moi-même, pendant le temps de mon règne, attaqué et défendu des provinces, et qu'en conséquence j'étais au fait de ce qu'il fallait à ce sujet, qu'ainsi, par l'expérience que j'en avais, je leur disais, en bon et fidèle allié :
Premièrement, que les 8,000 hommes qu'ils avaient en Finlande, ne suffisaient absolument pas pour la défendre.
En second lieu, que c'était une maxime adoptée universellement qu'il fallait tâcher d'éviter un échec au commencement d'une guerre, et que c'était pour cette raison-là qu'on se mettait alors toujours dans la meilleure posture qu'il était possible.
Qu'en troisième lieu, je les conjurais de penser, supposé le cas qu'ils auraient dès le commencement de la guerre un échec en Finlande, si alors la Porte Ottomane, de même que leurs autres alliés, n'hésiteraient pas de se mêler de leurs affaires, parceque régulièrement l'on jugeait par le commencement d'une affaire des suites qu'on en saurait espérer.
Que quarto, si les Russes avaient occupé une fois la Finlande, alors ni la France, ni moi, ni les Turcs ne serions plus à même de les en chasser, surtout quand leur intention serait d'étendre leurs frontières jusqu'au golfe de Bothnie, soit pour s'y maintenir, soit pour exécuter le dessein auquel feu Ostermann a songé ci-devant, savoir de faire de la Finlande un désert affreux, en donnant la liberté aux habitants de cette province ou de se retirer ou de faire le chemin de la Sibérie.
Vous ajouterez que, si toutes ces raisons militaires ne suffisaient pas pour les convaincre, je les priais pour cinquième raison qu'au moins ils ne voudraient pas mettre en oubli cette maxime politique qu'il ne faudrait jamais se mettre à la discrétion de son ennemi, quand on était en état de ne le point faire.
Voilà les raisons que vous devez leur détailler convenablement, pour me marquer à la suite si elles ont su leur faire impression ou non.
Federic.
Nach dem Concept.