4808. AU COMTE DE TYRCONNELL, MINISTRE DE FRANCE, A BERLIN.
Potsdam, 23 février 1751.
Milord. J'ai bien reçu votre lettre du 21 de ce mois et ressens, avec toute la reconnaissance que vous pouvez attendre de ma part, l'empressement que vous avez eu à me communiquer la copie de la lettre de M. de Puyzieulx que votre courrier vient de vous apporter. Je la joins ci-close, en vous priant de lui marquer de la manière la plus persuasive combien je suis touché des sentiments qu'il manifeste à mon égard, et que je fais les plus sincères remercîments de tous les soins que Sa Majesté Très Chrétienne prend pour mes intérêts. Je suis fort sensible à ce que votre cour applaudit au parti que j'ai pris sur l'élection de l'Archiduc; je l'entends parfaitement comme le marquis de Puyzieulx le marque dans sa lettre, et ma résolution est prise que, si l'affaire est portée à une Diète d'élection et qu'on y veuille décider la question préliminaire contre l'unanimité des voix, je ferai retirer mes ministres, en faisant leur protestation contre tout ce qui se fera à cette Diète.
Je sais bon gré au marquis de Mirepoix de ce qu'il a fait entendre raison au duc de Newcastle touchant le rappel du sieur Williams. Je donnerai sans doute l'audience de congé à celui-ci, quand il me la demandera. Les raisons des plaintes que j'ai eues contre lui, sont de ce qu'il a tenu dans de grandes tables des propos injurieux contre mon gouvernement, le traitant de misérable et de ridicule, tournant tout du mauvais côté et ajoutant qu'il aimerait mieux être un singe de l'île de de Bornéo que ministre prussien, ajoutant beaucoup d'autres indécences, traitant le gouvernement de tyrannique et montrant partout de la mauvaise volonté contre ce qui regarde moi et mes intérêts.
Quant aux affaires de Danemark, je crois apercevoir que ces gens croient la guerre plus proche qu'elle n'est, et que par cette raison ils craignent des engagements qui les mèneraient plus loin qu'ils voudraient, ainsi qu'il faut les attendre.
Je crois que l'Empereur est dans la bonne foi, je crois d'ailleurs que le roi d'Angleterre ne veut point la guerre générale, mais que l'Empereur et lui ont cru qu'elle se pourrait faire dans le Nord sans leur participation, prenant pour eux de rester derrière le rideau. A présent l'affaire de l'élection leur tient plus à cœur que celles de Russie, et si dans ces circonstances on ne les fait pas mollir sur ce qui regarde<280> le Nord, il semble qu'ils continueront leurs démonstrations jusqu'au moment que l'Angleterre trouvera à propos que la guerre commence. Sur ce, je prie Dieu etc.
Federic.
Nach der Ausfertigung im Archiv des Auswärtigen Ministeriums zu Paris.