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un mot de vrai dans tout cela, et que, depuis que le baron de Scheffer est parti de chez nous,1 je n'ai eu aucune lettre de lui jusqu'à ce moment-ci, ni sur cette affaire ni sur la chose la moins indifférente. Ainsi faut-il absolument qu'il y ait du malentendu là-dessus ou que ce soit un artifice du baron Bernstorff, controuvé par lui pour embarrasser nos amis ou pour brouiller plus encore l'affaire en question. D'ailleurs, quelle apparence y a-t-il, pourvu que vous et vos amis y songiez, que je dusse charger un ministre étranger, et que je n'ai connu personnellement que depuis très peu de temps, de se mêler de mes affaires et de lui donner commission d'expliquer mes sentiments sur une affaire que j'ai remise depuis longtemps déjà aux bons offices et à la médiation de la France? Enfin, il y aurait trop d'incongruité dans tout ceci, et si jamais le baron de Scheffer me fait une lettre là-dessus, il faut que je l'attende encore et qu'il l'ait faite alors de son chef et sans que je lui en aie donné la moindre commission; aussi en seriez-vous d'abord informé.

Quant aux soupçons qui vous sont venus comme s'il pouvait être un concert pris de la cour où vous êtes [avec] celles de Vienne, de Londres et de Russie pour me faire la guerre, et que l'affaire de Knyphausen y dût servir de prétexte, je veux bien vous faire observer qu'un tel concert me paraît aussi peu vraisemblable que l'histoire de la lettre du baron de Scheffer est absolument controuvée, et par conséquent tout-à-fait chimérique. Je ne veux point examiner si le Danemark est présentement dans une situation d'entrer en guerre, mais tout le monde conviendra que l'affaire de Knyphausen, où je n'agis qu'en qualité de codirecteur du cercle de Westphalie, n'est du tout une raison pour commencer une guerre. Si le Danemark ne voulait que s'en servir pour un prétexte, où est-ce que me ferait-il la guerre, puisque nous ne sommes point voisins? D'ailleurs, est-il à croire qu'un Prince qui est aux subsides de la France, voudrait contracter des liaisons avec ses ennemis pour commencer de gaîté de cœur une guerre ouverte contre moi, dans un temps où je suis bien et en alliance avec la France et la Suède, et surtout dans un temps où les deux cours impériales sont dans de grandes appréhensions pour que les Turcs n'éclatent pas contre elles, appréhensions d'où elles n'ont pu sortir depuis la dernière révolution à Constantinople et dont les inquiétudes qu'elles ont, s'augmentent de jour en jour? Tout cela pris et combiné ensemble, il s'ensuit, supposant que le Danemark avait quelque dessein contre moi, [qu']il aurait bien mal pris son temps pour l'exécuter. Quant à vous, vous devez faire vos réflexions et continuer, en attendant, de veiller de bien [près] sur tout ce qui se passe sur vos lieux, afin de pouvoir m'en faire des rapports exacts et fidèles.

Federic.

Nach dem Concept.



1 Vergl. S. 129.