5341. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A VIENNE.

Potsdam, 22 février 1752.

Je laisse à mes ministres du département des affaires étrangères le soin de vous instruire en détail des nouvelles que nous avons eues touchant les griefs de la cour de Suède contre les prétendues démarches des Russes en Finlande, et me borne à vous dire ici qu'autant qu'il paraît à présent, par de nouvelles informations qu'on a eues de cette affaire, le ministère de Suède s'est trop précipité là-dessus,46-2 en sorte qu'il y a des apparences — ce que je ne vous dis que pour votre direction seule — que c'est la faction du Sénat de Suède contraire à la cour qui a trempé dans cette affaire et a relevé des avis vagues et incertains, afin de jeter l'autre faction dans des alarmes et la tenir en haleine. Et, quoique le comte de Tessin ait donné d'abord chaudement là-dedans, jusqu'à requérir la France et moi de faire faire nos déclarations là-dessus aux cours amies de la Russie, nous n'avons cependant point voulu nous trop presser, mais attendre plutôt pour avoir des avis sûrs sur la vérité du fait, afin de ne pas faire des démarches prématurées. Aussi crois-je que tout ce vacarme s'en ira en fumée, car, en conséquence de mes dernières lettres de Stockholm, le ministre de Russie, comte Panin, a déclaré verbalement, et en dernier lieu moyennant une note par écrit présentée aux ministres de Suède, que ces bruits-là n'avaient aucun fondement et qu'ils n'avaient pu être semés que de la part de gens mal intentionnés, dans le but de refroidir le roi de Suède envers l'impératrice de Russie et de fomenter des mésintelligences entre eux.

L'on me marque d'ailleurs que le ministre autrichien, comte de Goës, avait pris occasion de parler à mon ministre, le sieur de Rohd, de ces avis de Finlande, qu'il avait traités de faux et de destitués de toute probabilité; qu'il n'en était rien constaté jusqu'à présent, sinon que dans une seule paroisse du territoire indécis, par mésentendu ou par un excès de zèle de quelque commandant russe par la frontière, on avait publié une levée de contributions : enfin, qu'on verrait bientôt de quelle manière la cour de Russie s'expliquerait avec le ministre de Suède Greiffenheim à Pétersbourg, qui avait ordre d'en communiquer avec ladite cour. Toutes ces circonstances me font présumer qu'il n'y a ni plan ni concert à cet égard entre les deux cours impériales, mais que ce sont<47> des mésentendus qui ont occasionné ce vacarme, qui apparemment n'aboutira à rien.

Pour ce qui regarde la négociation à Madrid, les nouvelles de Londres continuent d'assurer qu'on la regarde en Angleterre qu'autant que rompue, et que d'ailleurs, dès qu'on n'a pas pu porter l'Espagne de garantir tous les États de la maison d'Autriche et particulièrement les Pays-Bas, on était fort indifférent en Angleterre sur la conclusion du traité en question. Outre cela, des lettres de France assurent que c'était la réversion du Plaisantin qui avait été la pomme de discorde entre les parties contractantes et qui avait rompu la négociation. Comme vous dites, en attendant, qu'on regardait à Vienne cette négociation comme faite et finie, j'avoue que je ne sais point concilier ces différents avis.

Federic.

Nach dem Concept.



46-2 Vergl. S. 37. 3S. 47.