5611. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION DE ROHD A STOCKHOLM.
Potsdam, 30 septembre 1752.
J'ai bien reçu les dépêches que vous m'avez faites du 15 et du 19 de ce mois. Ne trouvant point de ma convenance le contrat projeté que vous m'avez envoyé touchant la livraison d'une quantité de boulets et bombes au prix et aux conditions qui y sont contenus, et ayant été obligé d'ailleurs par de certaines raisons de changer d'arrangements à ce sujet, mon intention est que vous devez laisser entièrement tomber cette affaire et remercier poliment“ ceux qui ont bien voulu vous servir là-dessus, en les renvoyant à un autre temps.
Pour ce qui regarde le projet de la cour de Vienne par rapport à l'élévation du prince Charles de Lorraine au trône de Pologne, dont le baron de Hœpken vous a parlé à l'occasion de l'émissaire turc qui doit se trouver en Pologne, vous direz à ce ministre que ce ne sont point des conjectures ni des soupçons qu'on a sur le projet mentionné, mais des avis sûrs et certains qu'on a, qu'il y a un plan formé et un concert pris secrètement entre les deux cours impériales de vouloir faire monter le prince Charles de Lorraine ou, en défaut de celui-ci, un des archiducs d'Autriche au trône de Pologne, dès qu'il viendra à vaquer par la mort du Roi régnant à présent, et que même la cour de Russie s'est engagée par quelque article séparé et secrétissime du traité de Pétersbourg de vouloir appuyer ce plan-là par un corps de 30,000 hommes. L'on sait d'ailleurs que, ce plan ayant été communiqué en Angleterre, la cour de Dresde avait trouvé moyen de découvrir, par un canal qu'elle eut en Angleterre, de quoi il s'agissait dans ce plan de la cour de Vienne, [et] s'était plainte amèrement envers celle de Londres des procédures peu amicales de ses alliés, mais que celle-ci avait nié l'affaire. Qu'en attendant l'on n'ignorait pas que la cour de Vienne poussait ce plan sous mains plus fort que jamais et qu'elle tâchait dans cette vue de s'attacher les premiers et les plus accrédités du parti opposé à la cour, et qu'au surplus l'on soupçonnait que le premier ministre de Saxe, le comte Brühl, donnait même secrètement les mains à ce plan-là par un motif d'intérêt particulier.
Vous pouvez bien vous ouvrir sur tout ceci au baron de Hœpken, en le conjurant cependant de me garder un secret religieux sur cette confidence, en ajoutant que, comme mon ministre en Pologne, le conseiller privé de Maltzahn, était tout-à-fait instruit de ce manège-là, je venais de lui donner mes ordres en conséquence des instances que lui, le baron de Hœpken, avait bien voulu me faire, d'agir confidemment<224> là-dessus avec le ministre de Suède et de se concerter avec lui par rapport à l'émissaire turc ci-dessus mentionné.
Qu'au surplus M. de Hœpken ne devait point croire que ce qui s'était passé à Constantinople par rapport à la dernière révolution qu'il y avait eu, était indifférent à la cour de Russie, mais que tout au contraire elle se trouverait peut-être plus embarrassée que celle de Vienne, au cas que la Porte Ottomane commençât à remuer.
Federic.
Nach dem Concept.