CLXIII.
La „Correspondance de Frédéric avec le marquis d'Argens“ atteste la longue et étroite amitié qui unissait le roi à celui-ci; Frédéric II lui a adressé un plus grand nombre de lettres qu'à aucune autre personne, si l'on excepte Voltaire. Cette correspondance se poursuivit sans interruption pendant toutes les fatigues, les dangers et les revers de fortune de la guerre de Sept-Ans; c'est même pendant cette période qu'elle offre le plus haut degré d'intérêt. Le roi épanchait alors devant d'Argens, dans ses lettres et dans ses effusions poétiques, tous les sentiments et toutes les émotions qui l'animaient dans ces années terribles. C'est de lui qu'il attendait et qu'il reçut les consolations de l'amitié dans ces heures sombres. Ce rôle du marquis d'Argens est exprimé d'une façon symbolique dans le dessin de Menzel. Un gladiateur romain, haletant et épuisé, se repose appuyé sur son épée, tandis que ses deux adversaires, grièvement blessés, chancellent et s'affaissent. Le gladiateur est Frédéric lui-même; d'Argens est ce vieux spectateur romain qui serre de la main gauche celle du gladiateur, et essuie de la main droite son front brûlant. Les autres spectateurs se détournent du combat avec indifférence.