<155>Cette armée, composée comme nous venons de le dire, vint mettre le siége devant Stralsund. Cette ville est assise au bord de la mer Baltique : la flotte suédoise pouvait la rafraîchir de vivres, de munitions et de troupes. Son assiette est forte : un marais impraticable défend les deux tiers de sa circonférence; le seul côté dont elle est accessible, était défendu par un bon retranchement, qui du septentrion prenait au bord de la mer, et allait s'appuyer, à l'orient, au marais dont nous avons parlé. Dans ce retranchement campaient douze mille Suédois, et Charles XII à leur tête. Le nombre d'obstacles qu'il y avait à vaincre, obligea les assiégeants à les lever successivement.
Le premier point était d'éloigner la flotte suédoise des côtes de la Poméranie, afin de priver Charles XII de toutes les sortes de secours qu'il pouvait attendre de la Suède. Le roi de Danemark ne voulait point risquer un combat avec l'escadre qu'il avait dans ces parages; et ce préalable du siége devint une affaire de négociation. Il est aussi facile de prouver à un homme clairvoyant la nécessité d'une chose par de bonnes raisons, qu'il est, pour ainsi dire, impossible de faire sentir l'évidence à un esprit borné, qui se défie de soi-même, et qui craint que les autres ne l'égarent. Cependant l'ascendant que le génie du roi de Prusse avait sur celui du roi de Danemark, força en quelque manière ce prince à voir la victoire que son amiral remporta sur l'escadre suédoise. Les deux rois furent spectateurs de ce combat, qui se donna à une lieue des côtes; et la mer devint libre aux alliés. Les Prussiens, commandés par le général Arnim, firent ensuite une descente sur l'île d'Usedom, d'où ils chassèrent les Suédois, et prirent le fort de Peenemünde, l'épée à la main.
Après que cet obstacle fut levé, on se prépara à l'attaque du retranchement. Pour le malheur des Suédois, il se trouva un officier prussien qui facilita cette entreprise, la plus difficile et la plus déci-