<175>Les calomnies que l'on avait répandues contre le duc d'Orléans, avaient fait des impressions si fortes dans le public, que la France s'attendait chaque jour à la mort de son roi, lorsqu'elle vit arriver inopinément celle du Régent. Ce prince, ayant passé le temps où il avait coutume de se faire saigner, fut attaqué d'apoplexie entre les bras de la duchesse de Falaris, dans un moment d'extase, qui fit douter s'il avait rendu l'âme par un sentiment de plaisir ou de douleur. Lorsque le roi Auguste de Pologne apprit les détails de cette mort, il dit ces mots de l'Écriture : « Ah que mon âme meure de la mort de ce juste! » Le cardinal du Bois avait précédé le Régent de quelques mois, et le peuple divulguait qu'il était parti pour préparer un quartier au Régent chez quelque Fillon de l'autre monde.
La Régence finit par la mort du duc d'Orléans, et le duc de Bourbon devint premier ministre. Ce changement dans le gouvernement de la France, et quelques entreprises de la maison d'Autriche contraires aux traités de paix, firent changer tout le système de l'Europe. Voici de quoi il était question : l'Empereur avait fait expédier des lettres de commission aux marchands d'Ostende pour trafiquer aux Indes. Cela réveilla l'attention de toutes les nations commerçantes; la France, l'Angleterre et la Hollande, alarmées d'un projet qui leur était également préjudiciable, s'unirent pour demander la suppression de cette nouvelle compagnie; mais la cour de Vienne ne s'en émut point, et voulut soutenir son projet de commerce avec hauteur.
On eut recours aux voies de conciliation, comme aux moyens les plus équitables pour terminer ces différends, et pour concilier d'autres intérêts, tels que la succession éventuelle de Parme et de Plaisance. On assembla un congrès à Cambrai, où personne ne voulut céder de son terrain. Les ministres disputèrent, comme de raison, avec chaleur; chacun soutenait sa cause par des arguments qu'il croyait sans réplique. Les maîtres d'hôtels et les marchands de vins