<186> parce qu'ils croyaient la puissance de Philippe V trop redoutable avec ses possessions; et à peine vingt ans s'étaient écoulés, que les navires anglais ramenèrent les Espagnols en Italie, et donnèrent à l'Infant Parme et Plaisance, dont le dernier duc venait de mourir.
En ce même temps, les Corses se révoltèrent contre les Génois, à cause de la dureté de leur gouvernement. L'Empereur y envoya des troupes au secours des Génois, qui réduisirent les rebelles à l'obéissance. Ces révoltes se renouvelèrent souvent, jusqu'à l'année 1736, que les Corses choisirent pour leur roi un aventurier, nommé Théodore de Neuhof. On présuma que le duc de Lorraine, qui depuis devint Empereur, fomentait cette rébellion; cependant, par le secours des Français, l'île de Corse fut entièrement rangée sous l'obéissance de ses maîtres.
On crut alors que l'Italie était menacée d'une nouvelle guerre. La reine d'Espagne, toujours inquiète et toujours en action, faisait de grands armements; cependant, au lieu de tomber sur l'Italie, ses troupes allèrent en Afrique, et s'emparèrent d'Oran. La reine d'Espagne obtint un bref du Pape, qui enjoignit au clergé de payer le dixième de ses revenus, autant que durerait la guerre contre les Infidèles. Dès ce moment, la Reine se proposa de perpétuer cette guerre à jamais; et, en sacrifiant tous les ans une centaine d'Espagnols qui périrent en escarmouchant contre les Mores, elle resta en possession des dîmes de l'Église, qui font un revenu très-important pour la couronne. Ainsi les maîtres du Pérou et du Potosi, manque d'argent, se mettaient aux aumônes des prêtres de leur royaume.
Après toutes ces digressions, il est temps que nous revenions à Berlin, où Seckendorff, par ses intrigues, avait beaucoup étendu son crédit. Il aurait bien voulu gouverner la cour tout à fait. Dans ce dessein il proposa au Roi de s'aboucher avec l'Empereur, qui s'était rendu à Prague, espérant de se rendre si utile, pendant ce séjour, que la confiance que le Roi avait en lui ne pourrait que s'accroître