<233> grossière, et elle languissait sous un gouvernement tout barbare; point de mœurs; aucunes connaissances; et la raison humaine, privée des lumières de la philosophie, demeurait abrutie dans sa stupidité. Le clergé et le peuple, dans le même cas sur ces articles, n'avaient aucun reproche à se faire.
Dans ce temps où les prêtres abusaient si grossièrement de la crédulité des hommes, où ils se servaient de la religion pour s'enrichir, où les ecclésiastiques menaient la vie la plus scandaleuse, un simple moine entreprit de réformer tant d'abus : il rendit aux hommes, par son exemple, l'usage de la raison, qui leur avait été interdit pendant tant de siècles; et l'esprit humain, enhardi par le recouvrement de sa liberté, étendit de tous côtés la sphère de ses connaissances.
ARTICLE TROISIÈME. DE LA RELIGION SOUS LA RÉFORME.
Je ne considérerai point l'ouvrage de la réforme du côté de la théologie et de l'histoire; les dogmes de cette religion et les événements qu'elle fit naître, sont si connus, que ce n'est pas la peine de les répéter : une révolution si grande et si singulière, qui changea presque tout le système de l'Europe, mérite d'être examinée avec des yeux philosophiques.
La religion catholique, qui s'était élevée sur la ruine de celle des juifs et des païens, subsistait depuis quinze siècles; humble et douce sous les persécutions, mais fière après son établissement, elle persécuta à son tour. Tous les chrétiens étaient soumis au pape, qu'ils croyaient infaillible; ce qui rendait son pouvoir plus étendu que celui du souverain le plus despotique. Un misérable moine s'éleva contre