<117>Dans la cuve, en bouillant, de la lie épurée;
Ce jus clarifié, sans mélange, sans art,
Vieilli dans ses vaisseaux, devient ce doux nectar
Dont les flots de rubis colorent votre verre.
Et ce brillant cristal que vous jetez par terre,
Ce vase transparent que vous n'estimez plus
Dans les bruyants transports des plaisirs de Bacchus,
Vous le devez encore à l'industrie humaine.
La cendre, la fougère, et le sable d'arène,
Préparés par les mains d'un habile artisan,
Changent de forme et d'être en un brasier ardent :
Leur composition, de dure et de solide,
Par la vertu du feu soudain devient fluide;
L'ouvrier, en soufflant par un tube de fer,
Dilate cette masse et la gonfle par l'air;
Souple au gré du ciseau dont elle est arrondie,
Elle devient cristal dès qu'elle est refroidie,
Et permet aux rayons d'oser la traverser.
Ainsi s'est fait ce verre où l'on vous voit verser
Cette boisson des dieux, cette liqueur riante,
Qui vous fait savourer sa mousse pétillante.
Avec plus d'art encor se font ces grands trumeaux
Dont la glace polie, égale et sans défauts,
Vous rend exactement, comme un portrait fidèle,
Les différents objets qui sont vis-à-vis d'elle.
C'est là, tous les matins après votre réveil,
Sur le choix des atours que vous prenez conseil;
Ce miroir, toujours vrai, règle votre parure,
Il vous fait arranger la fausse chevelure
Qu'on emprunta d'autrui, qu'on boucla tout exprès,
Pour que votre front chauve eût de nouveaux attraits.