<158>L'un soutient que Voltaire est dépourvu d'esprit,
Mais que Bähra doit charmer tout lecteur qui le lit,
Qu'Eulerb en vains calculs met sa philosophie,
Que Maupertuis des dieux parle comme un impie,
Que Sackc est amusant et Montesquieu diffus.
Les Grâces, dit un autre, inspirent Heinius,d
Haller,e à son avis, l'emporte sur Horace,
Et Gottsched doit tenir le sceptre du Parnasse.
Midas jugeait ainsi sur le sacré vallon
Des pipeaux du satyre et du luth d'Apollon.
Qu'heureux seraient nos jours, si tout juge profane
Portait comme ce roi la coiffure d'un âne!
Ah! quel plaisir de voir ces censeurs refrognés
Dans toute leur folie en public désignés!
Mais nous voyons partout fourmiller dans le inonde
De ces louches esprits dont ma patrie abonde.
Virgile avec Segraisf s'est trouvé comparé,
Auguste aux Antonins fut souvent préféré;
Des imposteurs mitrés qu'on nomme les saints-pères
a Nous présumons que le Roi veut parler de George-Henri Behr, médecin praticien à Strasbourg et président de la société allemande de la même ville, dès sa fondation en 1743. Ce savant, mort en 1761, est auteur d'un grand nombre d'ouvrages, entre autres : Die Gottheit oder Lob und Erkenntniss des Schöpfers aus seinen Geschöpfen, mit poetischer Feder entworfen. Augsbourg, 1751, in-8.
b Voyez t. IX, p. 74.
c Auguste-Frédéric-Guillaume Sack, premier prédicateur de la cour à Berlin, né en 1703, mourut en 1786. Son ouvrage intitulé Vertheidigter Glaube der Christen, 1748, fit sensation.
d Jean-Philippe Heinius fut directeur du gymnase de Joachim de 1730 à 1769; lorsque l'Académie des sciences fut rétablie, il devint directeur de la classe de philosophie. Il mourut en 1775.
e Voyez t. VII, p. 136.
f Jean Regnauld de Segrais, né en 1624, mort en 1701. On a de lui des Églogues, des Poésies diverses, une traduction en vers de l' Énéide et des Géorgiques, etc.