<205>L'un, en léguant son bien par testament
A des frapparts d'un très-riche couvent,
L'autre, en payant, escamotait son âme
Aux durs tourments de l'éternelle flamme.
Chacun avait étudié comment
Tromper du ciel la fureur vengeresse,
Malgré l'horreur de sa scélératesse.
Lorsque la Mort, s'approchant à tâtons,
Par le collet saisit le misérable,
En se vouant soudain à son patron,
Et se signant, on déroute le diable.
On fait des vœux aux saints de grand renom,
On se confesse à quelque jésuite,
Et l'on reçoit, avec de l'eau bénite,
Un passe-port signé pour le Cocyte,
Avec la messe et l'extrême-onction.
Alors le saint auquel le mort se voue,
Pour soutenir sa réputation,
Au paradis le protége et l'avoue;
Et chaque saint ayant eu, de tout temps,
Dans notre monde un nombre de clients,
Jugez combien le ciel en ses murailles
Avait alors rassemblé de canailles.
Quant aux grands saints, c'étaient tous imposteurs
Qui, se forgeant eux-mêmes des oracles,
En vrais fripons opéraient des miracles
Dont on croyait les cieux mêmes auteurs;
Et la très-sainte et ridicule Église
Dévotement, par bref, les canonise;
Et les voilà comme saints reconnus.
Telle était donc alors la cour céleste :