<211>Au paradis, devant moi, sous mes yeux,
Vous élevez vos fronts séditieux;
Selon qu'en dit à chacun sa faconde,
Chacun de vous veut gouverner le monde.
Dites, pourquoi suis-je donc dans les cieux?
Hier, regardant par ma longue lunette,
Je vis, dessus la petite planète,
Deux nations, fort s'entre-chicotant,
Un grain de sable entre elles disputant;
Et vous voilà d'abord en mouvement.
Aucun de vous entre soi ne s'accorde,
On prend parti, chacun prétend briguer,
De son côté ne tirant qu'à sa corde,
L'œil égaré, soufflé par la discorde,
Se mêle ici de nuire ou protéger;
A vous ne tient de me faire enrager.
Si l'on m'échauffe, on me fera résoudre
A vous chasser bien loin de mes États,
A vous lancer ma redoutable foudre,
A vous proscrire, à vous réduire en poudre.
Mais, pour le coup, je ne le ferai pas.
Sachez du moins qu'en ces lieux pacifiques
Je ne veux point de vos trames iniques,
Que je puis seul régler comme il me plaît
Le sort humain, sans que l'on en raisonne.
A cet essaim de frelons qui bourdonne
J'enjoins ici, je commande et j'ordonne
D'être tranquille et d'être satisfait. »
Il dit; les saints, les yeux baissés sur terre,
Genoux tremblants, et joignant les deux mains,