<291>Les plus voisins par-dessus lui tombèrent,
Tous pêle-mêle en pile s'entassèrent;
Hommes, chevaux, l'un l'autre se froissèrent;
Et, dessous eux, Franquin presque étouffait,
Se débattait, pestait et blasphémait.
Il était tard, aucun plus ne voyait.
Déjà la nuit a de ses voiles sombres
Couvert les cieux; ramenant aux mortels
Le doux sommeil, le silence et les ombres,
Elle en suspend tous les travaux cruels.
Proche du camp Franquin et sa séquelle
Étaient tombés, quand tout ce bruit affreux
Fit réveiller la lourde sentinelle,
Qui, tressaillant, lâcha son coup sur eux.
Ce bruit s'entend, et cause des alarmes;
Le camp lorrain, troublé, courait aux armes,
Quand on cria, Qui vive? - C'est Franquin.
Du corps de garde un exempt se détache;
Il vient, il voit, ciel! c'est notre bravache :
« Seigneur Franquin, quel malheureux destin
Vous met ici? » Tout était l'un sur l'autre,
Hommes, chevaux, dans la fange se vautre;
On les retire, et, pour cette fois-là,
Chacun d'iceux ses membres retrouva.
Puis, dans le camp lorsqu'on apprit l'affaire,
Le bon Charlot d'abord se recoucha;
Mais, fort ému, la nuit ne dormit guère,
A ses projets profondément rêva.
Franquin, Darget, doucement s'en allèrent,
Et dans des lits tous les deux se couchèrent.