<313>Fait à grand bruit sa décharge terrible;
Le jour s'éclipse, et la fumée horrible
Augmente encor l'horreur de l'action.
L'éclair des coups brille en ce noir nuage,
Les fusils font un bruit tel que l'orage;
Le plomb volant, tiré par peloton,
Siffle, fend l'air, et, sans distinction,
Princes, sujets également il frappe,
Portant la mort à tous ceux qu'il attrape.
Vous expirez,a généreux fils d'Albert,
Princes issus de tige souveraine;
Et vous, Guillaume, aux Prussiens si cher,
Et vous, de Rége,b et vous, brave Varenne;b
Que de héros moissonnés dans ces champs!
Telles ces fleurs de cent couleurs ornées
Qui, sans passer l'espace d'un printemps,
D'un souffle ardent sont pour jamais fanées.
Les Prussiens, dans ce combat fougueux,
Font redoubler leur cruelle décharge;
Dans un moment le fantassin recharge.
Le noir Etna dans ses brasiers affreux,
Non, tout l'enfer n'a point de pareils feux.
Des ennemis un grand nombre périrent,
Et de leurs rangs les files s'éclaircirent;


a Le Roi parle aussi de la mort héroïque des deux petits-fils du Grand Electeur dans son Épître à Stille (t. X, p. 149). Le margrave Frédéric fut tué à la bataille de Mollwitz, et son frère le margrave Guillaume, au siége de Prague, le 12 septembre 1744.

b Le major du génie Gabriel-Gédéon d'Azemar de Rége fut blessé mortellement à Ottmachau le 9 janvier 1741, et mourut le 12.
     Le marquis Frédéric-Guillaume de Varenne, colonel et chef du régiment d'infanterie no 31, mourut à Prague, d'une fièvre aiguë, le 11 février 1744.