<36>Reviens chez nous, dans ce séjour paisible,
De l'amitié recueillir tout le fruit.
Assez longtemps par un travail pénible
Tu cultivas le champ de ton esprit;
L'étude enfin, crois-moi, devient nuisible,
Il faut parfois se donner du répit :
Tout se repose, et même la nature
Fait aux étés succéder les hivers;
Mais le printemps répare avec usure
Le temps stérile où dormait l'univers.
Plus d'un plaisir est préparé pour l'homme,
Mais de ses biens négligent économe,
Il n'en sait point tirer tout l'usufruit.
Chasota se plaît dans la chasse et le bruit,
Le bon Jordan dans ses savantes veilles,
Césarionb à vider des bouteilles,
Un courtisan à briller à la cour,
Un amoureux à soupirer d'amour,
L'ambitieux à sentir la fumée
D'un vain encens qu'offre la renommée,
Le gros Auguste9 à payer des desserts,
Et moi peut-être à cheviller des vers.
Nos plus beaux jours se passent comme une ombre.c
Sage Jordan, pourquoi borner nos goûts?
Ah! je voudrais en augmenter le nombre :
L'homme sensé doit les réunir tous.d
9 Roi de Pologne.
a Voyez t. X, p. 217, et ci-dessus, p. 27.
b Voyez t. X, p. 24.
c Voyez t. X, p. 43.
d Voyez t. X, p. 195.