<67>J'abandonne ces vastes champs
Aux versificateurs habiles
Qui remplacent de notre temps
Les Horaces et les Virgiles.
D'eux redoute les coups de dents,
Et non de ma muse badine,
Qui folâtre, qui te lutine,
Qui, sans consulter le bon sens,
Débite ce qu'elle imagine,
En vers mauvais, mais non méchants.
Darget, que rien ne te chagrine,
Ris tout le premier de ces vers :
Leurs sons se perdent dans les airs,
Et je crierai plutôt famine
Que de souffrir qu'on les destine
A courir par tout l'univers.
Mais si, par quelque perfidie
Dont je ne puis me défier,
Dans le monde on les expédie,
Darget, par ma Palinodie
Tu sauras te justifier.
A Potsdam, ce 10 novembre 1749.