<176>Les fait passer par des mains affidées
Aux doux amants, ou bergers, ou héros.
La lettre vient, on la lit; que d'alarmes!
Elle disait en style gracieux :
« J'ai des trésors, ce sont là de vrais charmes;
Çà, que l'on m'aime, et qu'on rende les armes. »
Huit fois par mois ces aimables poulets
Venaient d'Utrecht à Freyberg par exprès,
Pour rendre un Suisse amoureux et fidèle.
Le pauvre Suisse, assez mal en sequins,
Pour ce métal se sentant quelque zèle,
Aurait voulu soupirer pour la belle;
Mais comme on sait qu'ici-bas les destins
De toute chose ont disposé la course,
Notre bon Suisse, imbu de projets vains,
Ne se sentit épris que de la bourse,
Pour elle enfin s'allumait son brasier.
L'Amour d'Utrecht, balourd et non sorcier,
Ne savait point le code de Cythère;
Il ignorait que le grand art de plaire
A Cupidon valut plus d'un laurier.
Qu'arriva-t-il de l'affaire entamée?
Le voici net, et le monde saura,
Ainsi par moi que par la renommée,
Que notre Suisse assez froid demeura;
Le feu languit, la cendre s'affaissa,
Tout s'éteignit, et parmi la fumée,
L'Amour d'Utrecht dans les airs s'envola.
A tout Amour de pareil caractère,
Intéressé, froid et sans passion,
Du petit dieu très-difforme avorton,