Oui, j'avais donné entre bien des personnes la préférence à la fille de la comtesse de Tervisane, Adélaïde. Elle est bien élevée, et sa mère, qui brille par tous les actes de dévotion qu'elle a faits depuis deux ans, lui a inculqué des sentiments avec lesquels je me flatte qu'elle pourra retirer mon neveu de ses désordres. Ses mœurs sont la simplicité même; elle ne fait que sortir du couvent; jamais fard n'a sali son visage; jamais elle n'a fait de dépense en tous ces brimborions ridicules qui composent l'ajustement des femmes; en un mot, c'est la vertu même, et la personne qui me convient.
VERVILLE.Comme je vois que cette affaire vous tient si fort à cœur, je veux m'employer volontiers auprès de votre neveu pour l'y persuader; cela n'est pas impossible. Mais, de grâce, ne choquez point ses préjugés; c'est par l'adresse que je prétends réussir. Lorsque l'on a manié les caractères des hommes, l'expérience montre qu'il n'en est aucun dont on ne vienne à bout, dès qu'on en a saisi le faible. Ne vous embarrassez point de votre neveu; c'est un jeune homme, et je vous garantis que je l'amènerai au point que vous désirez. Mais sondons premièrement quelles sont les dispositions de la comtesse et d'Adélaïde, pour que, étant assuré de leur consentement, je puisse agir d'une façon d'autant plus efficace auprès du marquis.
BARDUS.C'est bien penser; allons-y de ce pas.
(Ils sortent.)