<47>Toi, qui sus attacher mon bonheur à ton sort,
Ami, sur ta douleur sache faire un effort.
Que l'âge injurieux, amenant la faiblesse,
Efface sur ton front les ris et la jeunesse,
Qu'il amortisse en toi ce feu si pétillant
Dans ton air, dans tes yeux, dans tes discours brillants;
Et qu'au lieu des plaisirs et de la gaîté pure,
Qu'à notre seule aurore accorda la nature,
Il amène avec soi le cortége infernal
De la douleur aiguë et du chagrin fatal;
Quand, fondant sur ton corps, la goutte impitoyable
Sur ton lit étendu te tourmente et t'accable,
Que tes membres enflés, affaiblis et perclus,
Relâchent leurs ressorts par les maux abattus :
Alors à ton secours appelle l'espérance,
L'oubli, la fermeté, la sage patience.
Ces fleurs naissent partout, on n'a qu'à les cueillir;
Ta volonté suffit pour les faire fleurir,
Comme au haut de ces rocs escarpés, effroyables,
Croissent pour nos besoins des simples secourables.
Que sert au voyageur fatigué du chemin
De quereller tout haut son astre et son destin?
Ce n'est pas en jurant que son chemin se change,
Que ses pieds embourbés se tirent de la fange;
Son esprit agité devient un imposteur,
Il augmente sa peine et grossit son malheur.
C'est par présomption que notre cœur murmure,
Nous sommes tous comblés des dons de la nature;
Mais des présents du ciel l'homme peu satisfait
Veut jouir sans chagrin d'un bonheur plus parfait.
Il ne lui suffit point que le soleil l'éclaire,