<179>bourg, qu'avant la fin de juillet il n'y aurait plus d'armée prussienne, et qu'il ne resterait d'autre ressource au roi de Prusse que de s'enfermer dans Magdebourg ou d'aller s'embarquer à Stade pour se rendre à Londres. Partout où il y avait des ministres autrichiens on tenait le même langage, à Madrid, à Turin, à Naples; on voulut même donner au public la joie d'apprendre d'avance cette grande nouvelle; on l'instruisit par les gazettes qu'il était impossible que le roi de Prusse, entouré de quatre armées, pût pénétrer en Silésie et éviter de succomber sous tant d'ennemis qui l'environnaient. Ces quatre armées étaient celle du maréchal Daun et les trois grands corps différents des généraux Lacy, Loudon et Beck. A ces quatre armées on aurait pu en joindre une cinquième; c'était celle des Russes, qui était auprès de Glogau.
Le roi de Prusse comprit bien l'extrémité dans laquelle il se trouvait. Il n'avait avec lui, et c'est un fait constant et connu, que trente-cinq mille hommes, qui se trouvaient pressés de tous côtés par quatre-vingt-dix mille Autrichiens; on en portait pour lors le nombre beaucoup plus haut dans toutes les gazettes de Vienne et de l'Empire, quoique, dans l'exacte vérité, il n'y en eût que quatre-vingt-dix mille. Dans une situation aussi critique, ce prince, ne croyant pas que toutes les ressources qu'il a trouvées tant de fois dans son génie et dans sa fermeté pussent le sortir d'embarras, résolut de se tirer d'affaire aux dépens de son salut et du repos de son âme. Nous avons appris à Vienne par une lettre de son premier aumônier, qui a été interceptée par nos hussards, les faits dont je vais parler à Votre Révérence.
Il paraît donc par cette lettre, écrite à un professeur du collége de Joachim, à Berlin, que le Roi rencontra dans une petite ville près de Liegnitz un homme qu'on disait être un philosophe; mais ce n'était qu'un dangereux sorcier. On assure même qu'il travaillait à l'Encyclopédie, et qu'il avait fait l'article Magie dans ce livre infernal. Ce