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69. DE M. DE SUHM.

Pétersbourg, 27 octobre 1738.



Monseigneur

Vous me connaissez trop bien, j'espère, pour jamais me croire capable d'oublier vos volontés ou de négliger vos intérêts; aussi me flatté-je, après tout ce que je viens de vous détailler, être pleinement justifié à vos yeux à l'égard du reproche que je paraissais avoir mérité par un si long silence.

aLe manque d'argent ici passe l'imagination, ce qui m'a contraint à être fort réservé et discret, pour épargner à certaines personnes la honte d'un aveu qu'on n'aime pas à faire. Mais aussitôt que la paix sera faite, les caisses regorgeront; et nous l'aurons vraisemblablement cet hiver. Tout au moins se tiendra-t-on au logis et sur la défensive, et cela reviendra pour nous à peu près au même. J'espère alors pouvoir amener les choses au point que vous désirez, ou tout au moins les préparer de manière que vous puissiez faire avec bienséance quelques démarches convenables. Je serais au désespoir de vous en conseiller d'autres; je vous prie de m'en croire incapable. Cependant, dès qu'une occasion favorable se présentera, je ferai une nouvelle tentative d'un autre côté.

Comme mon secrétaire d'ambassade à Berlin va être employé dans le pays, je vous prie d'ordonner à Rohwedell de se mettre en correspondance avec moi, et de me mander son adresse et ses titres, de peur de quiproquo.

En attendant, j'ai sondé le terrain pour voir si je pourrais être votre enrôleur ici. Cette idée m'est venue, et j'en ai pris la résolution par zèle pour V. A. R., quelque répugnance que je trouve à faire un tel métier. On est tout à fait disposé ici à vous obliger en toutes


a En chiffre.