91. DE M. DE SUHM.
Pétersbourg, 6 novembre 1739.
Monseigneur
La précipitation avec laquelle j'ai été obligé d'expédier dernièrement le bas officier avec les trois Turcs Bosniaques, à cause de la nouvelle de la paix, m'ayant empêché de profiter de cette bonne occasion d'écrire à V. A. R., elle permettra que je m'en dédommage aujourd'hui.
Plus d'une raison, monseigneur, me détermine à vous prier de vous servir de signes arabesques sur certaines matières assez curieuses et intéressantes d'elles-mêmes pour mériter un tel soin. Je ne puis rien encore mander de positif sur certain sujet à V. A. R., mais elle se souviendra de ce que je lui ai fait espérer pour le temps de la paix que je lui ai prédite. Il faudra voir maintenant si je serai bon prophète jusqu'au bout.
Je recommence fort à espérer que l'affaire de B. aura lieu; toutefois je n'ose pas faire le prophète sur ce sujet.
Pour en revenir aux Turcs, je suis bien aise que les quatre premiers soient arrivés à bon port. J'espère que les trois qui les ont suivis plairont encore davantage à V. A. R.
Le cheval persan que le duc de Courlande envoie à V. A. R. se mettra en chemin dès que le temps le permettra. On le conduira jusqu'à Memel, où on le remettra au commandant, à qui elle voudra bien faire savoir où il doit le faire mener.
Si, d'un côté, j'ai été attendri et pénétré de reconnaissance par la généreuse et touchante attention de V. A. R. à m'envoyer des re-mèdes, j'ai été bien affligé et alarmé, de l'autre, par la description des terribles et dangereuses crampes d'estomac dont elle est de temps en temps attaquée. Quelque confiance que j'aie en vos conseils, monseigneur, je doute cependant que les remèdes que vous me proposez