<67> ennuyé tout seul, je prétends m'en dédommager par ce récit, et je vous prie, monsieur, de me le passer malgré sa longueur, vous assurant que je suis du reste avec beaucoup de cordialité et d'estime, etc.

Frederic.

17. AU MÊME.

Ruppin, 25 septembre 1732.

Je crois que c'est pour me faire encore plus regretter votre compagnie que vous me faites l'agréable description de la vie champêtre que vous menez à Rühstädt. Vous convenez avec moi qu'on jouit à la campagne d'un repos que l'on ignore à la cour. C'est ce qui me fait trouver tant de charmes à ma solitude, et ce qui me fait goûter le genre de vie des petites villes, où les soins et les inquiétudes sont bannies de l'esprit. Vous ne craignez jamais de venir trop tard; étant le maître, vous êtes au-dessus des compliments qui obligent souvent, par bienséance, de proférer des paroles que le cœur désavoue. Vous réglez les heures du jour selon qu'il vous plaît, vous ne voyez que ceux que vous voulez, et ce nombre de faux amis, inévitables aux cours, n'interrompt pas votre tranquillité, et vous laissez à Dieu et à notre monarque le soin de gouverner la machine de l'État. Déchargé du fardeau que donnent les soins des affaires, le sommeil vous devient paisible; des rêves fortunés vous font passer la nuit agréablement; le sommeil semant de ses pavots sur vos yeux, ils ne se rouvrent qu'après que le valet de chambre, à force de secousses, vous les fait rouvrir, et alors vous projetez de quel divertissement vous voulez jouir ce jour-là. Étant au-dessus de l'indigence, les soins du lendemain ne vous incommodent pas, et un repas frugal, accom-