32. AU MÊME.
Ruppin, 27 janvier 1733.
Monseigneur mon très-cher ami,
J'ai reçu en fort bon état celle que vous m'avez fait le plaisir de m'écrire par la poste, et je puis dire que je suis tout affligé de ce que vous m'écrivez du lieutenant Wollenschläger.a Je crois que le Roi en sera outré, et je prévois que M. Ginkel aura un mauvais rôle à jouer. J'ai reçu une lettre du comte de Seckendorff, dans laquelle il me marque que le Roi ira le quatrième à Brunswic, et la spécification de sa suite. Je n'ai pas le cœur de lui répondre, mais je vous prie de lui faire un compliment fort obligeant de ma part, et de lui marquer l'obligation que je lui avais des attentions qu'il avait pour moi, et que j'aurais volontiers répondu moi-même, si je ne craignais trop de donner des soupçons. Je ne sais ce que fait ma sœur, ni le pauvre Margrave; je n'en ai pas entendu le mot, et je crains fort qu'ils n'aient encore quelque déboire à essuyer. A présent j'étudie des compliments pour Brunswic, et je vais à la chasse des sangliers pour en apprendre, car entre Westphalien (der mit den Schweinen erzogen und geboren ist) et entre porc, il n'y a pas grande différence. Ma princesse m'a envoyé une tabatière de porcelaine que j'ai trouvée cassée dans sa boîte, et je ne sais si c'était pour marquer la fragilité de son pucelage, de sa vertu, ou bien de toute la figure humaine. Je l'ai pris pour un fort mauvais pronostic, car une tabatière cassée, selon la Philosophie occulte d'Agrippa, signifie quelque petit débordement d'amour. Voilà bien assez badiner pour le coup, et pour parler d'une chose plus sérieuse et qui m'intéresse davantage, je vous assurerai, mon très-cher ami, que je suis et serai jusqu'au tombeau, très-sincèrement et cordialement, etc.
a Fusillé par les Hollandais. Voyez (Fassmann) Leben und Thaten des Königs von Preussen Friederici Wilhelmi, t. I, p. 785 et 786.