<30>neur de vous écrire. Je vais passer une quinzaine de jours à Paris, et je voudrais bien, pendant que j'y serai, recevoir quelques ordres de V. A. R., et couper l'herbe sous le pied à Thieriot. Mon séjour en Flandre a été rempli par vos bienfaits. Vous avez su sans doute, monseigneur, que celuia qui en était chargé nous trouva à Enghien, répétant une comédie. Nous descendîmes promptement du théâtre pour aller jouer une partie de quadrille avec ces boîtes charmantes et pleines de grâces et de galanterie que V. A. R. m'a fait l'honneur de m'envoyer. Quelques jours après, le duc d'Aremberg vint célébrer ici la santé de V. A. R. avec ce bon vin de Hongrie, qui est véritablement du nectar. Nous avons encore pris cette liberté avec M. Schilling;b car V. A. R. doit bien me rendre la justice de croire que, dès que je sais un Prussien dans Bruxelles, mon plus grand soin est de saisir cette occasion de parler de vous et de m'informer d'un prince qui m'honore de tant de bontés, et que j'admire par tant de titres.

Je n'ose demander à V. A. R. des nouvelles de ses progrès en physique, car je vois, par les lettres dont elle honore M. de Voltaire, que Machiavel et la poésie ont la préférence. J'espère pourtant que quelque jour vous donnerez quelques moments à une science si digne de vous occuper, et je vous avoue, monseigneur, que mes désirs là-dessus sont un peu intéressés, car je me flatte que mon commerce en serait plus agréable à V. A. R.

Je ne puis vous exprimer la tristesse que j'ai sentie dans mon voyage au pays de Liége, quand j'ai pensé que, l'année passée, V. A. R. était presque dans ces cantons. Mais, monseigneur, n'y reviendrez-vous jamais? Je prévois que je jouerai longtemps ici le rôle de la comtesse de Pimbesche,c et je m'en console dans l'espérance que mes procès


a M. Girard, négociant, à Berlin.

b Guillaume Schilling, lieutenant au régiment du Prince royal, alors en recrutement à Bruxelles.

c Voyez les Plaideurs, comédie de Racine, acte I, scène VII.