<288>Je voudrais bien que vous ne souffrissiez aucune des infirmités attachées au sort de l'humanité, et j'en suis d'autant plus affligé, que votre fluxion m'a privé du plaisir de recevoir plus tôt de vos nouvelles.

On me mande à peu près la même chose de Versailles et de la cour palatine, touchant l'impression qu'a faite en ces lieux le choix que le roi des Romains a fait d'une princesse bavaroise. Il n'y a qu'à attendre, et sûrement on verra les Français et les Autrichiens prêts à s'arracher le blanc des yeux, et cela, en peu de temps. L'ambition des uns heurtera l'ambition des autres, et cela finira par une rupture. En attendant, que le roi des Romains épouse qui il lui plaira; je ne saurais me persuader que ce mariage entraîne les suites qu'on suppose à Versailles et à Mannheim. Cette princesse apportera à Vienne une dot, des bijoux, et peut-être quelques seigneuries que la maison de Bavière possède en Bohême, et voilà tout; et, en mettant les choses au pis, ne faut-il pas considérer l'âge de l'électeur de Bavière, qui peut vivre longtemps? Et, au cas que la cour de Vienne, au décès de ce prince, porte ses vues trop loin, il est sûr que cela donnera lieu à une guerre bien vive et bien sanglante. Mais, madame, probablement nous ne la verrons pas; ainsi laissons ces soins à la postérité, sans que cela nous inquiète.

Je vous rends mille grâces de l'intérêt que vous daignez prendre à ma personne, et j'espère, ma chère duchesse, que vous rendez justice à la réciprocité de mes sentiments. Ils seront inviolablement les mêmes, étant avec toute l'estime et la considération possible,



Madame ma cousine,

de Votre Altesse
le bon cousin et serviteur,
Federic.