<57> troupes, il les exposait à être envahis par les Saxons et les Hanovriens, qui n'auraient pas manqué d'y faire une diversion : et dans le cas où le Roi eût voulu laisser une partie de son armée dans la Marche pour garantir ses États contre la mauvaise volonté de ses voisins, il se serait trouvé trop faible des deux côtés. La France avait garanti, l'année 1733, la succession palatine au duc de Sulzbach, pour obtenir la neutralité du vieil électeur pendant la guerre qu'elle fit sur le Rhin. Ce n'aurait pas été cette garantie qui aurait arrêté le Roi, car communément ce sont des paroles aussitôt données que violées; mais l'intérêt de la France voulait des voisins faibles sur les bords du Rhin, et non des princes puissants et capables de lui résister. A peu près dans le même temps, le comte de Seckendorff qui avait été détenu dans les prisons de Grätz, obtint sa liberté, à condition de remettre à l'Empereur tous les ordres par lesquels il avait été autorisé à donner au feu roi de Prusse les assurances les plus solennelles de l'assistance que l'Empereur lui promettait pour favoriser ses droits à la succession des duchés de Juliers et de Berg.a
Cet exposé montre combien les circonstances étaient peu favorables pour la maison de Brandebourg; et ce sont les raisons qui déterminèrent le Roi à s'en tenir au traité provisionnel que son père avait conclu avec la France.b Mais si des raisons aussi fortes modéraient les désirs de gloire dont le Roi était animé, des motifs non moins puissants le pressaient de donner, au commencement de son règne, des marques de vigueur et de fermeté, pour faire respecter sa nation en Europe. Les bons citoyens avaient tous le cœur ulcéré du peu d'égard que les puissances avaient eu pour le feu roi, surtout dans les dernières années de son règne, et de la flétrissure que le
a Il existe là-dessus une autre version, donnée par le comte de Schmettau dans ses Mémoires secrets de la guerre de Hongrie, pendant les campagnes de 1737, 1738 et 1739. Francfort, 1771, in-8, p. XIV. Le comte de Seckendorff obtint sa liberté de sa nouvelle souveraine le 6 novembre 1740.
b Voyez t. I, p. 200.