2. DE MYLORD MARISCHAL.
Neufchâtel, 22 septembre 1754.
Sire,
Je suis arrivé, il y a deux jours, las comme un chien, par les mauvais chemins et le mauvais temps, quoique en approchant d'ici il s'était remis au beau. En entrant en Suisse, la première nuit on me donna au cabaret des cerises, la seconde des fraises et des framboises. J'avais une belle peur, car les cerises encore n'étaient-elles pas mûres; mais dans le château où la bonté de V. M. m'a donné les invalides, j'ai jusqu'à cette heure un temps d'Espagne et la plus belle vue du monde. J'ai déjà essuyé bien des harangues; chacun en particulier et chaque corps en corps m'en fait, et j'en ai bien encore qui m'attendent. Ma grandeur s'acquitte très-mal des réponses; j'ai mieux fait à l'église ce matin, où l'ennui du sermon aura sans doute passé pour un air de contrition. J'espère que la Vénérable Classea a été édifiée de ma contenance; j'ai naturellement le museau triste et de Calvin. Dans huit jours les cérémonies se finiront, et je supplie V. M. de croire que je ferai vos affaires de mon mieux, et que j'ai l'honneur d'être avec la plus parfaite reconnaissance et le plus profond respect
de Votre Majesté
le très-humble et très-obéissant et très-fidèle serviteur,
Le Maréchal d'Écosse.
a Titre que l'on donne à Neufchâtel à la compagnie des pasteurs, autorité ecclésiastique supérieure.