<322> ne leur faut qu'un ministre habile pour profiter, à la paix, de la situation brillante où les ont mis leurs armes.
Adieu, mon cher mylord; mon nez est plein de reconnaissance du tabac dont vous avez la bonté de le fournir. Je ne vous dis rien de moi; vous savez que je suis votre ami à toute épreuve.
41. AU MÊME.
Péterswaldau, 1er septembre 1762.
Votre lettre, mon cher mylord, au sujet de Rousseau de Genève m'a fait beaucoup de plaisir. Je vois que nous pensons de même; il faut soulager ce pauvre malheureux, qui ne pèche que par avoir des opinions singulières, mais qu'il croit bonnes. Je vous ferai remettre cent écus, dont vous aurez la bonté de lui faire donner ce qu'il lui faut pour ses besoins. Je crois, en lui donnant les choses en nature, qu'il les acceptera plutôt que de l'argent. Si nous n'avions pas la guerre, si nous n'étions pas ruinés, je lui ferais bâtir un ermitage avec un jardin, où il pourrait vivre comme il croit qu'ont vécu nos premiers pères. J'avoue que mes idées sont aussi différentes des siennes qu'est le fini de l'infini; il ne me persuaderait jamais à brouter l'herbe et à marcher à quatre pattes. Il est vrai que tout ce luxe asiatique, ce raffinement de bonne chère, de volupté et de mollesse, n'est point essentiel à notre conservation, et que nous pourrions vivre avec plus de simplicité et de frugalité que nous ne le faisons; mais pourquoi renoncer aux agréments de la vie, quand on en peut jouir? La véritable philosophie, ce me semble, est celle qui, sans interdire l'usage, se contente à condamner l'abus; il faut savoir se