<138> de ses lettres, de ses ordres, et me parler avec cette bonté pleine de confiance qui me charme, je crois qu'elle ne peut mieux faire que d'envoyer les lettres à M. Pidol, maître des postes à Trêves; la seule précaution est de les affranchir jusqu'à Trêves; et, sous le couvert de ce Pidol, serait l'adresse à d'Artigni, à Bar-le-Duc. A l'égard des paquets que V. A. R. pourrait me faire tenir, peut-être la voie de Paris, l'adresse et l'entremise de M. Thieriot, seraient plus commodes.
Ne vous lassez point, monseigneur, d'enrichir Cirey de vos présents. Les oreilles de madame du Châtelet sont de tous pays, aussi bien que votre âme et la sienne. Elle se connaît très-bien en musique italienne; ce n'est pas qu'en général elle aime la musique de prince. Feu M. le duc d'Orléans fit un opéra détestable, nommé Panthée. Mais, monseigneur, vous n'êtes pour nous ni prince ni roi; vous êtes un grand homme.
On dit que V. A. R. a envoyé des vers charmants à madame de La Popelinière. Savez-vous bien, monseigneur, que vous êtes adoré en France? On vous y regarde comme le jeune Salomon du Nord. Encore une fois, c'est bien dommage pour nous que vous soyez né pour régner ailleurs. Un million au moins de rente, un joli palais dans un climat tempéré, des amis au lieu de sujets, vivre entouré des arts et des plaisirs, ne devoir le respect et l'admiration des hommes qu'à soi-même, cela vaudrait peut-être un royaume; mais votre devoir est de rendre un jour les Prussiens heureux. Ah! qu'on leur porte envie!
Vous m'ordonnez, monseigneur, de vous présenter quelques règles pour discerner les mots de la langue française qui appartiennent à la prose, de ceux qui sont consacrés à la poésie. Il serait à souhaiter qu'il y eût sur cela des règles; mais à peine en avons-nous pour notre langue. Il me semble que les langues s'établissent comme les lois. De nouveaux besoins, dont on ne s'est aperçu que petit à petit, ont donné naissance à bien des lois qui paraissent se contredire. Il semble