<216> général nous sont un témoignage, et de quoi vous persuaderiez seul, s'il n'y avait que vous dans l'univers.
Cependant il faut se garder de juger du monde par parties; ce sont les membres d'un tout, où l'assortiment est nécessaire. Dire, parce qu'il y a quelques hommes malfaisants, que Dieu a tout mal fait, c'est perdre de vue la totalité, c'est considérer un point dans un ouvrage de miniature, et négliger l'effet de l'ensemble. Comptons que tout ce que nous apercevons dans la nature concourt aux vues du Créateur. Si nos yeux de taupe ne peuvent apercevoir ces vues, ce défaut est dans notre nerf optique, et non pas dans l'objet que nous envisageons.
Voilà tout ce que mon imagination a pu vous fournir sur le roman de la fatalité absolue et sur la prescience divine. Du reste, je respecte beaucoup Cicéron, protecteur de la liberté, quoique, à dire vrai, ses Tusculanes sont, de tous ses ouvrages, celui qui me convient le mieux.
Vous ennoblissez le Dieu de M. Clarke d'une telle façon, que je commence déjà à sentir du respect pour cette Divinité. Si vous eussiez vécu du temps de Moïse, le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob n'y aurait rien perdu; et sûrement il aurait été plus digne de nos hommages que celui que nous présente le bègue législateur des Juifs.
Je me réserve de vous parler une autre fois de votre excellent Essai de physique. Cet ouvrage mérite bien d'occuper une autre lettre particulièrement destinée à ce sujet. Je remplirai également mes engagements touchant le Siècle de Louis XIV; et je joindrai à cette lettre quelques considérations sur l'état du corps politique de l'Europe,a que je vous prierai cependant de ne communiquer à personne. Mon dessein était de le faire imprimer en Angleterre, comme l'ouvrage d'un anonyme. Quelques raisons m'en ont fait différer l'exécution.
J'attends l'Épître sur l'Amitié comme une pièce qui couronnera
a Voyez t. VIII, p. I et II, et p. 1-32.